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Kamikaze
Par Martin Bot
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Doté d’un moteur à réaction lui permettant d’atteindre les 500 km/h, le nouveau drone de combat russe « Banderol » pourrait contraindre l’Ukraine à revoir sa stratégie de défense aérienne.
Des frappes de drones russes ont fait deux morts à Kiev, en Ukraine, dans la nuit du mardi 6 à mercredi 7 mai. Quelques heures avant, des drones ukrainiens en direction de Moscou ont été identifiés par les forces russes, ce qui a conduit au blocage du principal aéroport de Moscou. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, les drones de combat sont au cœur de la stratégie militaire des deux pays. Une dynamique relancée par l’apparition d’une nouvelle technologie russe, le mystérieux drone kamikaze Banderol.
Certes, les Ukrainiens ont développé des capacités de production élevées : « Les drones ukrainiens, trois fois supérieurs aux drones européens en termes de prix et de performances, ont atteint un niveau de sophistication élevé », explique à la revue spécialisée en géopolitique Le Grand Continent, Taras Chmut, analyste militaire ukrainien. Une supériorité qui se manifeste surtout en ce qui concerne « la prise de vues » et les « drones de reconnaissance tactique ».
Utilisé à Odessa
Mais avec le Banderol, les Russes jouent sur un terrain différent avec une autre catégorie de drone, non pas destiné à recueillir des informations mais à frapper en profondeur. Peu d’informations officielles ont été communiquées sur le nouvel engin. « Depuis plusieurs semaines, les forces d’occupation russes utilisent un nouveau drone appelé “Banderol” pour des attaques terroristes dans la région d’Odessa », écrit sur ses réseaux sociaux le très suivi Serhiy Beskrestnov, analyste militaire ukrainien. « Des informations relatives au Banderol circulent depuis longtemps, mais nous ne voyons que maintenant les premiers cas réguliers de son utilisation. On ne sait pas encore si ce produit sera aussi menaçant que le célèbre KAB », du nom d’une arme de précision guidée russe, a déclaré l’expert en drones.
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Sur le portail « Guerre et sanctions » de la Direction générale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien, une note indique que les entreprises JSC Kronshtadt et JSC KT-Unmanned Systems sont impliquées dans la production de ce drone. Ces sociétés russes n’en font nullement mention elles-mêmes, comme l’indique le média ukrainien spécialiste de l’armement Defence Express.
500 km/h
La principale caractéristique de ce drone de combat ? Il se pare d’un moteur à réaction qui lui permet d’atteindre une vitesse de pointe à 500 km/h, soit plus du double des drones classiques à propulsion. Le magazine américain Forbes estime le prix de cette arme à 1,4 million de dollars, soit celui d’un Shahed-236, un drone-kamikaze avec lequel il présente des caractéristiques similaires. C’est sensiblement plus que les drones russes Geran-2, à 20 000 dollars, mais bien moins que les missiles Kinzhal dont le coût à l’achat avoisine les 10 millions de dollars.
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Le déploiement de cette technologie est inquiétant pour l’Ukraine. Jusque-là, la stratégie des deux camps en matière de drones reposait sur l’envoi d’une armada de petits engins à bas coût, pour inonder et défier les systèmes antiaériens ennemis. Les Ukrainiens s’en défendent grâce à des brouilleurs de fréquence, qui permettent de désorienter les drones kamikazes en bloquant leur capacité de géolocalisation. Mais le nouveau drone russe pourrait décoller à haute altitude et échapper à ces champs magnétiques. De quoi toucher ensuite le territoire ukrainien en profondeur.
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Toutefois, cet avantage n’est pas irrattrapable. « Au fur et à mesure que l’Ukraine adapte ses systèmes et stratégies de défense aérienne, l’efficacité du Banderol diminuera. Quoi qu’il en soit, ce système offre à la Russie une capacité précieuse à un moment critique de la guerre », conclut Forbes.
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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne