mardi, mai 13, 2025
  • العربية
  • English
  • À la une
  • Sportive
  • Actualités
  • Politique
  • Économie
  • Login
  • Register
No Result
View All Result
No Result
View All Result
Home @MediaPart

Dans le Finistère, l’affaire Bétharram libère la parole chez d’anciens élèves du Kreisker

mai 13, 2025
in @MediaPart, Actualités
Reading Time: 12 mins read
0 0
A A
0
Dans le Finistère, l’affaire Bétharram libère la parole chez d’anciens élèves du Kreisker
0
SHARES
0
VIEWS
Share on FacebookShare on Twitter

Mediapart - News

https://static.mediapart.fr/etmagine/default/files/2025/05/12/chapelle-du-kreisker-smartphone.jpg

« Quand« Quand j’ai entendu parler de Bétharram, c’est comme si tout remontait à la surface. On avait mis tout ça sous le paillasson et on se rend compte maintenant que c’était pas normal. » 

Du bar dans lequel est assis Jacques Urien, jeudi 24 avril, on peut apercevoir le clocher de la chapelle Notre-Dame du Kreisker surplomber les toitures du centre-ville de Saint-Pol-de-Léon, dans le nord du Finistère.

Related posts

Gérard Depardieu condamné : “les monstres du cinéma ne sont plus intouchables”

Gérard Depardieu condamné : “les monstres du cinéma ne sont plus intouchables”

mai 13, 2025
Cannes 2025 : gloire, films, business… Ce qu’ils attendent de la 78e édition

Cannes 2025 : gloire, films, business… Ce qu’ils attendent de la 78e édition

mai 13, 2025

À quelques mètres du pied de la plus haute construction gothique de Bretagne se trouve l’entrée de l’établissement scolaire privé catholique auquel elle a donné son nom et où le sexagénaire, au visage amène et à la chevelure blanche, a passé une partie de sa scolarité à la fin des années 1960.

La chapelle Notre-Dame du Kreisker à Saint-Pol-de-Léon (Finistère). © Photo Splann !

La lumière douce de cette fin de matinée printanière contraste avec le récit de souvenirs douloureux. Fils de maraîchers croyants pratiquants, Jacques Urien affirme avoir reçu des coups et été témoin de violences physiques sur ses camarades de la part de certains enseignants du Kreisker. Et si lui-même n’en a pas été victime, il avait aussi connaissance à l’époque des agissements problématiques d’ordre sexuel de la part d’un prêtre : Jacques Choquer. 

Un abbé accusé de violences sexuelles

Plusieurs anciens élèves mettent en cause l’ancien professeur de français et de breton pour des propos et attitudes inappropriés à caractère sexuel, des années 1950 aux années 1980.

D’après leurs récits, il avait ainsi la manie d’interroger les élèves – qu’il pouvait recevoir individuellement dans sa chambre située à l’étage du bâtiment principal du Kreisker – sur leurs pratiques masturbatoires. Il pouvait, affirme Lionel, élève dans les années 1970, se montrer « très tactile », passant parfois « sa main sous le pull » des élèves.

En classe, « il se levait et frottait son sexe contre son bureau » régulièrement, attestent plusieurs anciens élèves. À tel point que des écoliers auraient eu l’idée un jour de recouvrir avec de la craie les abords de son bureau : Jacques Choquer se serait ainsi retrouvé avec ses vêtements blanchis à hauteur du bassin.

Ronan Peron, élève de 1985 à 1986, affirme que le prêtre, qui était son professeur principal, s’est peu à peu rapproché de lui lors d’un entretien dans sa chambre et lui a mis une main sur le genou. « Je lui ai dit “non mais là vous déconnez !” et je lui ai demandé de me ramener chez moi », assure le boulanger artisanal de 56 ans, aujourd’hui installé à Roscoff.

Anita, une femme trans (le collège n’était pas encore mixte à l’époque où elle a été scolarisée), estime, elle aussi, avoir subi du harcèlement de la part de Jacques Choquer, qui, selon elle, l’« idolâtrait ». Alors qu’elle était en première, il lui aurait laissé en bas d’un devoir une note manuscrite soulignée en rouge disant à peu près ceci : « Ton devoir m’a bouleversé […] Il ne peut qu’être l’œuvre d’une âme pure. J’aimerais beaucoup relire ce devoir seul à seul avec toi. » Anita n’a pas donné suite et d’une moyenne de 16 à 18, elle serait passée à 12 environ en français.

Les agissements de Jacques Choquer sont décrits par le menu dans le livre Tu rôtiras en enfer, publié en 2016 et écrit par Jean-Pierre Salou, un éducateur spécialisé et psychologue à la retraite ayant fréquenté Le Kreisker, de 1957 à 1964. Le prêtre y apparaît sous le pseudo « l’abbé C. ». « Son surnom parmi les élèves, c’était Chocul [orthographe interprétée par Splann ! – ndlr] », révèle l’auteur, aujourd’hui âgé de 77 ans. Preuve selon lui que son comportement était de « notoriété publique ».

« C’était un pervers qui jouissait que vous lui racontiez vos “péchés de chair”. Sauf qu’il n’était pas mandaté pour des cours d’éducation sexuelle. » Jean-Pierre Salou juge que « ce qui est grave, c’est qu’on a donné à ce prêtre l’aumônerie de la troupe scout du Kreisker alors qu’on connaissait ses problèmes avec les élèves ».

En fonction depuis 2022, le directeur de l’ensemble scolaire Le Kreisker, Nicolas Guillou, confirme avoir reçu un témoignage, il y a quelques semaines, concernant Jacques Choquer. Il dit en avoir été « profondément touché » : « Il est toujours bouleversant, en tant que chef d’établissement, d’apprendre que certains faits ont pu survenir dans un lieu dont la vocation première est d’éduquer, d’accompagner et de protéger les jeunes. »

Le directeur précise : « En dehors de ce contact, je n’ai reçu aucun autre signalement d’anciens élèves ou de familles, ni par écrit ni de vive voix, concernant des faits de violences. » Le diocèse de Quimper et Léon a, lui aussi, reçu en 2022 « le témoignage de l’épouse d’une victime aujourd’hui décédée, relatif à des violences sexuelles concernant le collège du Kreisker », impliquant Jacques Choquer.

L’institution indique n’avoir rien trouvé « dans les archives » concernant ce prêtre. Elle fait valoir par ailleurs que, « depuis 2016, avec la création d’une cellule d’écoute, et plus encore depuis la publication du rapport de la Ciase en 2021, le diocèse de Quimper et Léon s’est engagé de manière active dans la lutte contre les abus sexuels au sein de l’Église. Cet engagement se concrétise notamment par la mise en place d’une commission diocésaine dédiée à la protection des mineurs, la signature d’un protocole avec le procureur de la République de Brest [en 2022 – ndlr], ainsi que l’adoption d’une charte pour la protection des mineurs et des personnes vulnérables et des formations ».

Des violences physiques « institutionnalisées »

Si les violences sexuelles sont reprochées à un seul enseignant du Kreisker, les violences physiques, elles, auraient été commises par plusieurs professeurs, assurent les anciens élèves interrogés par Splann !.

Jacques Urien se rappelle des « corrections » et des « humiliations » de la part d’un surveillant, d’enfants balancés dans de « grandes poubelles d’un mètre sur un mètre » et rossés de coups pour avoir couru pour se rendre en cours – ce qui était interdit –, et même d’un élève qui aurait eu le doigt cassé, sans doute après une punition physique non maîtrisée. Atteint de troubles dys – ce qu’il n’a compris que des années plus tard –, Jacques Urien évoque des états de « faiblesse » ou « d’incompréhension » en lien avec ses apprentissages.

Il aurait appris à ses dépens qu’au Kreisker, les punitions physiques ne venaient pas seulement corriger de mauvais comportements. « On recevait aussi des coups quand on était en difficulté », affirme-t-il.

Les violences physiques pouvaient, selon Yannick Dirou, 59 ans, tout aussi bien sanctionner une mauvaise note à un devoir, « une mauvaise réponse » donnée au professeur ou « une fausse note » jouée en cours de musique. « À un moment, vous êtes plus préoccupé de savoir si vous allez prendre une baffe ou une beigne qu’autre chose, explique celui qui a été scolarisé au Kreisker à partir de 1978 et y a passé trois ans. C’était terrible. C’était un coup à faire une fugue. J’y repense souvent et j’en ai les larmes aux yeux. »

Yannick Dirou utilise le mot « terrorisme ». Trois autres anciens élèves emploient le même terme, pourtant lourd de signification. L’un d’eux, Thierry Oulhen, en précise le sens : « D’une certaine manière, ils cultivaient la terreur et la violence chez les autres », estime cet infirmier de 56 ans, passé par le lycée au début des années 1980. Si ce fils d’un mareyeur et d’une agente en valeurs mobilières dit n’avoir reçu qu’une gifle en un an et demi, il a surtout « vu les violences » subies par ses camarades et ressenti « une atmosphère de tension, d’humiliation, de rabaissement ».

À tel point que lui et ses frères ont décidé de quitter prématurément l’établissement, plusieurs mois avant la fin de leur deuxième année scolaire. Quasiment tous les anciens élèves indiquent que la répression au Kreisker n’était pas la même en fonction de l’origine sociale. « Il y avait une discrimination notoire entre les enfants des milieux populaires et ceux des milieux aisés », affirme Thierry Oulhen.

La classe de première C du Kreisker lors de l’année scolaire 1981-1982. © Archives personnelles

Le frère de Yannick Dirou, Thomas, garde quant à lui de « très mauvais souvenirs de violences physiques » qui lui ont « gâché deux années d’école ». Il se souvient en particulier d’un professeur qui portait tout le temps des sabots et aurait mis des coups de pied dans le derrière des élèves. « On appelait ça des pointus. » Avant de préciser : « J’en ai vu des plus violentés que moi. »

Scolarisée de 1976 à 1983, Anita évoque pour sa part « des souvenirs visuels terribles », des « murs ensanglantés » même. Elle revoit mentalement un professeur, André Guéguen, « prendre les gamins et les projeter à terre », voire « contre les portemanteaux ». Pourtant, dans le Léon, « terre catholique par excellence », « Le Kreisker, c’était la référence ! », formule-t-elle. « À Saint-Pol, à l’époque, même ceux qui n’avaient pas de croyances y allaient. Tout le monde y allait. » La fréquence et le niveau de violences dont elle aurait été témoin la porte à parler de « violences institutionnalisées ».

Ancien professeur de français au Kreisker, Paul Rigolot, 71 ans, réfute cette expression. « Quand j’ai commencé à enseigner, aucun directeur, aucun professeur ne m’a ordonné, ni conseillé, ni même suggéré d’user de sévices corporels vis-à-vis des élèves en cas de paresse, d’insolence ou d’insubordination, assure l’un des rares enseignants à échapper aux accusations de violences de la part des anciens élèves interrogés. La baffe était dans l’air du temps, dans certains collèges comme dans certaines familles, et pas forcément chez des gens violents. »

Oui, c’est vrai, il m’est arrivé de donner des gifles. Parfois peut-être par énervement.

André Guéguen, ancien professeur au Kreisker

Les baffes ou gifles n’étaient toutefois qu’un type de punition physique utilisé par les professeurs de l’époque. Et comme le font remarquer plusieurs anciens élèves, « il y a “gifles” et “gifles” ».

Jean-Claude Rohel, enseignant au Kreisker, devenu par la suite maire de Plouénan et député du Finistère, est identifié par plusieurs anciens élèves comme ayant eu l’habitude de retourner sa chevalière à l’intérieur de sa main avant de gifler les élèves, occasionnant fatalement des marques et des douleurs plus importantes. Un autre enseignant, du nom de « Sparfel », aurait utilisé la même méthode.

Un autre professeur, déjà cité plus haut, a marqué plusieurs générations d’élèves : André Guéguen. Celui-ci est cité par près d’une dizaine d’anciens élèves interrogés par Splann ! comme étant l’auteur de nombreuses violences physiques.

Attablés à la terrasse du Ty Pierre, avec vue sur le port de Roscoff, Claude et Lionel, scolarisés dans les années 1970, ainsi que Loïc*, élève de 1980 à 1983, partagent leurs souvenirs d’un homme dont ils n’ont jamais oublié le nom. 

« Nous avions un mot pour les raclées données par André Guéguen : “baboren”, raconte Loïc. Tout le monde se souvient de ce couloir noir, en haut de l’escalier monumental, dans lequel, à chaque récré, des élèves punis et envoyés par les profs attendaient que Guéguen leur donne une “baboren”. Souvent les causes de ces énormes raclées étaient ridicules. André Guéguen nous a essentiellement enseigné la violence. »

Claude et Lionel en auraient été directement victimes. « Il était raide comme un piquet, les bras collés au corps, aucune expression sur le visage, à peine un rictus », raille ce dernier à propos d’André Guéguen. Celui qui a effectué l’intégralité du collège et du lycée au Kreisker se souvient d’une scène de violence : « Guéguen m’éclate le classeur avec les gros anneaux sur la figure. » Pour quelle raison ? Il a oublié.

Claude, qui se définit lui-même comme un élève « bagarreur », assure qu’il avait « droit à Guéguen une fois par semaine ». Il se remémore un épisode lors duquel il aurait couru dans les escaliers du Kreisker avant d’être corrigé par le professeur. « Il m’a tabassé à un point que, alors que j’avais essayé de me protéger, j’ai vu tout noir avec des petits points blancs. J’étais complètement sonné. Pendant trois, quatre jours, je n’ai pas pu poser ma joue gonflée sur l’oreiller », certifie de sa voix rauque le pêcheur à la retraite de 63 ans.

Plusieurs anciens élèves racontent le « choc » d’avoir revu André Guéguen, des années après leur scolarité, à l’occasion de l’enterrement d’un proche, celui-ci assurant parfois des cérémonies religieuses localement. Si aucune des victimes n’a porté plainte contre lui, c’est parce que pendant longtemps, ses violences ont été considérées comme légitimes par leur entourage. 

« On disait pas trop à nos parents parce que ç’aurait été notre faute », explique Yannick Dirou. « J’ai toujours entendu dire “si t’en as pris, c’est que t’as mérité” », appuie Lionel Devaux, une autre victime d’André Guéguen, âgé de 60 ans aujourd’hui. Pour beaucoup, la prise de conscience du caractère anormal de ces violences n’est intervenue que très récemment. « Ça m’a sauté à la gueule quand l’affaire Bétharram est sortie », ajoute l’ancien pensionnaire du Kreisker.

L’entrée de l’ensemble scolaire Le Kreisker, à Saint-Pol-de-Léon (Finistère). © Photo Splann !

Splann ! a pu rencontrer André Guéguen le 24 avril à son domicile. Le professeur à la retraite – il a enseigné au sein de l’établissement privé catholique, de 1963 à 1984, avant de devenir directeur du collège Saint-Ursule à Saint-Pol-de-Léon de 1984 à 1996 puis d’être affecté à Douarnenez jusqu’à sa retraite en 2002 – « assume » une seule forme de violence envers les élèves. 

« Oui, c’est vrai, il m’est arrivé de donner des gifles. Parfois peut-être par énervement », admet le retraité âgé de plus de 80 ans. Mais pas davantage. « Des parents – pas beaucoup – ont demandé des comptes. J’avais de plutôt bonnes relations avec eux dans l’ensemble. Certains participaient à la catéchèse avec moi. »

André Guéguen ajoute que « la pression était assez forte [au sein de l’établissement – ndlr]. Donc il y avait de la discipline, [il] le reconna[ît] ». Quant aux « raclées » évoquées par d’anciens élèves, l’ancien professeur les réfute catégoriquement : « Non, je refuse. Il n’y a eu aucune méchanceté de ma part. Sûrement pas. » André Guéguen bénéficie de la présomption d’innocence.

Pour Jacques Urien, le fils de maraîchers, il ne s’agit pas d’incriminer uniquement des personnes, il faut dénoncer un système. « Tout le monde était coupable. Même s’il y en avait deux qui donnaient des coups et dix qui ne disaient rien, ils étaient tous coupables, peste-t-il. Car tout le monde savait : la direction, le personnel, les infirmiers, les médecins… »

Aller vers une « reconnaissance des violences »

De l’avis de plusieurs anciens élèves, les violences ont commencé à diminuer fortement avec le passage à la mixité, au milieu des années 1980.

Aujourd’hui, Nicolas Guillou, directeur du Kreisker, assure que l’ensemble scolaire « s’inscrit en rupture totale avec ce passé. L’attention portée à chaque élève, dans un cadre exigeant et bienveillant, est au cœur de [leur] projet éducatif. Cela se manifeste concrètement dans [leurs] pratiques pédagogiques, dans le soin apporté au climat scolaire, et dans la relation de confiance construite jour après jour avec les élèves et leurs familles ».

Les anciens élèves se posent différemment face à ces agissements passés. Jacques Urien, qui avait un temps sollicité le collectif du collège Saint-Pierre du Relecq-Kerhuon, également dans le Finistère, voulait avant tout apporter son témoignage : « Je n’ai pas d’amertume, je n’en veux à personne, assure-t-il. Chacun pensait avoir raison au moment où il le faisait. Je pense qu’il y avait une volonté de bien faire, pour l’élite. »

Anita espère qu’une enquête sera menée, une cellule d’écoute mise en place et une position officielle de l’Église établie. « Il ne va pas suffire de dire que “c’était une autre époque”, juge-t-elle. Il faudra quelque chose qui puisse se graver dans la mémoire. » À ce stade, personne n’entend porter plainte. Mais pour Thierry Oulhen, l’enjeu est ailleurs : « Rendre tout ça public, c’est une forme de justice, de reconnaissance des violences. »

0 0 votes
Article Rating
S’abonner
Connexion
Notification pour
guest
guest
0 Comments
Le plus populaire
Le plus récent Le plus ancien
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
  • À la une
  • Sportive
  • Actualités
  • Politique
  • Économie

Welcome Back!

Login to your account below

Forgotten Password? Sign Up

Create New Account!

Fill the forms below to register

All fields are required. Log In

Retrieve your password

Please enter your username or email address to reset your password.

Log In

Add New Playlist

No Result
View All Result
  • العربية
  • English
  • À la une
  • Sportive
  • Actualités
  • Politique
  • Économie
  • Login
  • Sign Up
Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?
wpDiscuz
0
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x
()
x
| Répondre