Comme de nombreux supporters du PSG, Adrien a patienté de longues heures mardi en espérant pouvoir acheter une place pour la finale de Ligue des champions contre l’Inter, le 31 mai à Munich, via la vague 2 lancée par le club de la capitale. Et il a réussi à décrocher un billet in-extremis grâce à l’un de ses amis. Au terme d’une journée riche en émotions…
Il a mis son réveil une bonne heure plus tôt. Au cas où. Avant de commencer sa journée en télétravail, Adrien allume son ordinateur vers 8h, mardi matin, dans le 20e arrondissement de Paris. Après s’être préparé un thé, il sort sa carte bancaire et connecte son profil sur le site de l’UEFA. Pour être prêt à dégainer le plus vite possible. Comme beaucoup de supporters du PSG, ce chargé de communication espère décrocher une place pour la finale de la Ligue des champions face à l’Inter, le 31 mai à Munich. Après avoir longtemps fréquenté le Virage Auteuil dans les années 2000, le quadragénaire n’a plus d’abonnement à Parc des Princes aujourd’hui. Il compte sur Sébastien, le pote de son collègue Marco, pour lui envoyer son code afin de tenter sa chance lors de la vague 2. Sans aucune certitude…
“Je n’ai pas super bien dormi la veille, je me suis réveillé plusieurs fois en pensant à cette finale. Du coup, je suis un peu crevé quand je démarre ma journée”, raconte Adrien à RMC Sport. “Je veux me donner le maximum de chance de choper une place. En même temps, je sais que ça va être galère. La vague 1 se termine à 9h, tout le monde est en stress en attendant la vague 2. On lit partout qu’il ne reste plus beaucoup de places. Et comme d’habitude, le PSG ne donne aucune info. Pas d’horaire, pas de créneau. Rien. J’ai une petite boule au ventre. Mon collègue Marco m’envoie un message pour me dire qu’il est branché lui aussi. Il veut prendre une place pour son frère. En principe, son abonnement Auteuil peut lui permettre d’acheter un billet à 70 euros. Pareil pour celui dont son pote doit me faire bénéficier. Pour ça, il faut qu’il m’envoie rapidement son code dès qu’il le recevra. Il va falloir être très vif. Je lui demande si son pote est bien sur le coup. Il me rassure: ‘Oui, oui, t’inquiètes, il est au taquet”.”
“On n’ose à peine aller aux toilettes”
“Il ne fait pas très beau à Paris. Le ciel est capricieux. Je commence à tafer, en restant à l’affût. Il est 9h passé. Ma femme a déposé les enfants à l’école. La vague 1 est officiellement terminée. La vague 2 s’annonce imminente. Enfin, peut-être. On ne sait pas. Je fais un tour sur les réseaux, personne ne sait. Tout le monde attend, prêt à bondir dès la réception du fameux code à usage unique. Le moindre mail reçu accélère nos battements cardiaques. On n’ose à peine aller aux toilettes, de peur de rater le top départ. Je suis en lien avec Marco sur WhatsApp. Lui est en repos, mais il est déterminé à faire croquer son frère. Je trouve ça beau de sa part. On s’envoie des messages et des vocaux. On échange des infos, plus ou moins fiables. Je lui demande: ‘Ton pote est toujours à l’affût hein?’ Je continue de bosser, la tête un peu à Munich. Je m’efforce d’y croire. Il faut que j’y sois!”
“On arrive à l’heure du déjeuner. Toujours rien. Certains disaient que les codes seraient envoyés dans la matinée. Ce sera sûrement dans l’après-midi. Des grands médias le confirment. Je continue de patienter en bossant. Je prends une pause pour me faire à manger, mais je n’ai pas vraiment faim. Je bois beaucoup de thé pour rester réactif, mais ça me donne envie d’aller aux toilettes. Et à chaque fois, je me trace pour ne pas manquer le mail du pote de Marco. Lui aussi s’occupe comme il peut de son côté. Il a fini tard la veille et il aimerait bien faire une petite sieste. Mais c’est trop risqué. Imagine si le mail arrive à ce moment-là! Alors il zone dans son appart, met une série en fond et scrolle sur Tik Tok…”
“Balancez-nous ces p… de codes”
“Le temps passe lentement dans l’attente. Pourtant il est déjà 15h. Qu’est-ce qu’ils foutent le PSG? Pourquoi ils n’envoient pas les codes? Je me rassure en voyant que beaucoup s’impatientent aussi sur les réseaux. En même temps, ça m’inquiète de voir tous ses gens à l’affût. Je me mets à douter. Ça se trouve, je n’aurais rien. Je vais arriver trop tard, le temps que je récupère le code et que je me connecte à la vente… Je chasse ses mauvaises pensées. Je me replonge dans le boulot, entre deux échanges avec Marco. ‘Ton pote est toujours branché hein?’ ‘Oui, oui, ne t’en fais pas, je lui ai envoyé 200 messages depuis ce matin’. Des comptes plus ou moins suivis commencent à dire que la vague 2 va être reportée. Relou. Ça me fait douter. Et s’il y avait un souci? Ça se trouve il n’y a plus de place et ils n’osent pas le dire? Oh non, flemme d’avoir attendu tout ce temps pour rien…”
“L’horloge indique maintenant 16h. Dans une heure, j’aurai fini ma journée de travail. Et trois-quarts d’heure plus tard, je dois récupérer mes enfants à l’école, qui se trouve à une dizaine de minutes à pied. Je sens que les codes vont arriver quand je serai dehors. Je vais devoir tenter ma chance dans la rue. Pas grave, je reste confiant. Finalement, je rentre avec ma fille de 9 ans, mon fils de 6 ans et leurs cartables. Les codes n’ont toujours pas été envoyés. Tant mieux. Je laisse mes enfants aller se doucher, se mettre en pyjama et jouer dans leurs chambres. Heureusement qu’ils sont autonomes. Ça me permet de me reconcentrer sur ma mission du jour. Mais il est 18h30 et toujours rien à l’horizon. Les rumeurs de report s’intensifient. On parle d’une potentielle vague 2 décalée à vendredi. Le Parisien et RMC Sport confirment finalement que c’est bien pour ce soir. Ça me remet un coup de pression. On attend depuis plus de dix heures avec Marco, la fatigue se fait sentir. J’ai vraiment envie d’en finir, quitte à ne pas réussir à avoir la place. Allez, balancez-nous ces p… de codes!”
“J’ai ta place, on va à Munich!”
“Vers 19h30, mes enfants s’agitent dans les chambres. Je vais les calmer vite fait. J’appelle Marco pour faire un point. On commence à discuter et là il me coupe d’un coup: ‘Attends, attends, je crois que j’ai quelque chose’. ‘Quoi, qu’est-ce qu’il y a? Tu as reçu le mail?’ ‘Oui, c’est bon je l’ai! Attend j’accède à la vente’. Moi, en revanche, je n’ai toujours pas le code de son pote. ‘Je lui dis de te l’envoyer, ne bouge pas’, me lâche Max, en continuant sa tentative. ‘Je suis sur la place à 180 euros, c’est bon, je la prends pour mon frère… Mais attend, en fait je peux en prendre deux!’ ‘Quoi, tu es sérieux?’ ‘Oui, je peux en prendre deux, vas-y je t’en prends une’. ‘Oh mon gars, si tu y arrives, j’accroche ton portrait dans l’entrée, j’écris ton nom sur un mur de l’appart’. ‘Arrête tu es con, ne me stresse pas, je tremble là, tu ne te rends pas compte’. ‘Vas-y, reste fort, je crois en toi, tu vas le faire!’ J’attends ensuite quelques secondes, qui me paraissent durer plus d’un an. Silence total… Et là Marco hurle dans le haut-parleur: ‘Yessssss, ça y est, j’ai les deux places. J’ai ta place fréro, on va à Munich!’”
“J’ai du mal à réaliser. J’ai chaud, je sens les larmes qui montent. J’ai envie de crier. Je crie. Sûrement un peu trop fort. Mes enfants me demandent si tout va bien. ‘Oui, oui, ne vous inquiétez pas’. Et là, je reçois le mail du pote de Marco. Je fonce, en espérant prendre d’autres billets pour mon beau-frère et un pote. Je suis super rapide. J’accède à la vente, je mets deux places dans mon panier, je valide et là ça se met à charger longuement, très longuement… et je reçois un message d’erreur. Je réessaye au moins trente fois, avant d’être éjecté du site et de me retrouver dans une waiting room. Quand je reviens sur la page, la vente est affichée sold out. Je suis un peu déçu, mais j’ai quand même ma place grâce à Marco.”
“Papa, on mange bientôt? On a faim…”
“Je l’appelle: ‘Tu sais que tu es mon héros. On va à la finale, je n’y crois pas.’ ‘C’est un vrai miracle, on est passé par un trou de souris. En vrai, c’est le destin, il fallait qu’on y soit’. Je contacte d’autres amis qui ont tenté de prendre cette deuxième vague. Quelques-uns ont réussi, mais la plupart sont restés sur le carreau, dégoûtés. Entre l’adrénaline, la fatigue et l’euphorie, je plane un peu pendant quelques instants. Je vais vivre une finale de Ligue des champions du PSG au stade! Je n’arrive pas bien à redescendre. Ma fille passe la tête dans le salon: ‘Papa, on mange bientôt? On a faim…’ Je regarde mon portable, il est plus de 21h. Merde, je les ai complétement zappés, en mode père indigne. Je fonce à la cuisine et je prépare du blé à la tomate, des petits pois et des œufs. Je coupe un peu de pastèque et je mets une cuillère de miel dans les yaourts. On passe à table. Mes enfants ont l’air d’apprécié. Ou peut-être qu’ils ont juste trop faim pour se plaindre. Je les regarde en souriant bêtement. C’est l’un des meilleurs repas de ma vie…