52 millions d’euros sécurisés en mars 2024, puis 100 millions d’euros, via un crédit syndiqué vert en juillet de la même année. Au total, Waga Energy a réussi à sécuriser plus de 200 millions d’euros en 2024, auxquels s’est ajoutée une nouvelle ligne de crédit de 25 millions d’euros, début 2025. Des sommes qui semblaient offrir au spécialiste de la valorisation des déchets en biométhane une partie des capitaux nécessaires pour financer son développement.
Mais un montant insuffisant pour assouvir l’appétit de la cleantech, créée en 2015 par trois ingénieurs du groupe Air Liquide, et qui avance sur un marché très capitalistique, avec son concept de raffinerie permettant de filtrer et valoriser le gaz à effet de serre issu des sites de stockage de déchets en biométhane, via un procédé associant filtration membranaire et distillation cryogénique. Lors de son introduction sur le marché boursier en 2021, Waga Energy avait annoncé un objectif de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’horizon 2026.
D’où l’annonce, le 6 juin dernier, de son entrée en négociations exclusives avec le fonds suédois EQT, l’un des plus grands fonds européens en matière d’infrastructures, qui gère actuellement près de 79 milliards d’euros d’actifs. Celui-ci souhaite racheter, par l’intermédiaire d’EQT Transition Infrastructure, 54% de ses actions en circulation et 65,9% des droits de vote de la société, sur une base entièrement diluée.
Car, en plus de ses fondateurs – Mathieu Lefebvre, Guénaël Prince, Nicolas Paget qui possèdent une holding (Holweb SAS2) -, la société compte aussi des actionnaires que sont Starquest Capital, Tertium, Noria, SWEN Impact Fund for Transition et ALIAD. Selon cette offre, un rachat d’actions s’effectuerait ainsi au prix initial de 21,55 euros par unité, et par l’intermédiaire de Box BidCo, un véhicule d’acquisition dédié.
EQT lancerait ensuite une offre publique d’achat simplifiée sur les actions restantes de Waga Energy, qui était entrée en Bourse à l’automne 2021. À terme, si les conditions législatives et réglementaires sont remplies, « EQT a l’intention de demander le retrait obligatoire des actions restantes et de retirer la Société de la cote », précise le communiqué de presse. L’opération a déjà reçu un avis favorable du conseil d’administration.
Accélérer son déploiement
« EQT s’engage à soutenir le développement futur de Waga Energy, en apportant des ressources financières et en offrant un accès à son réseau de conseils industriels en Europe et en Amérique du Nord », a ainsi résumé par voie de communiqué Patrick Jaslowitzer, managing director au sein de l’équipe EQT Infrastructure Advisory.
Le fonds suédois n’en est pas à son coup d’essai avec cette acquisition. Depuis son lancement il y a 15 ans, celui-ci a déjà investi près de 17 milliards d’euros dans des projets liés à la transition énergétique, avec notamment, la transformation des déchets en énergie via trois sociétés : Encyclis, Reworld et Arcwood Environmental.
Une expérience qui pourrait bien être utile à Waga Energy, dont les ambitions sont portées par les bons résultats de 2024. L’an dernier, la cleantech a connu une croissance de 67% de son chiffre d’affaires (55,7 millions d’euros) et de 40% de son pipeline commercial, qui s’élève aujourd’hui à 16,8 térawattheures (TWh), au point même d’annoncer un Ebitda proche de l’équilibre. Un dynamisme qu’elle entend encore renforcer.
« Le partenariat avec EQT débloquerait des investissements significatifs pour accélérer notre croissance et convertir notre pipeline de 16,8TWh par an, tant en Amérique du Nord qu’en Europe », reconnaît Mathieu Lefebvre, CEO et Fondateur de Waga Energy, par voie de communiqué.
Car si l’entreprise a annoncé repousser de quelques mois son objectif de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires et de 4 térawatt-heures (TWH) de capacité installée, elle assure maintenir son ambition de 400 millions d’euros de chiffres d’affaires récurrents d’ici à fin 2026.
L’Amérique en ligne de mire
Déjà présente en Espagne, aux États-Unis et au Canada, la société tisse petit à petit sa toile dans d’autres territoires, comme en témoigne un premier projet lancé en Italie, en novembre dernier, et l’ouverture d’un bureau au Brésil la même année. Une implantation qui vient compléter sa présence au Mexique et en Colombie.
Sous oublier, l’Amérique du Nord qui devrait devenir, à terme, le « centre de gravité de génération du chiffre d’affaires » de la société, confiait Mathieu Lefebvre à La Tribune en avril dernier. Alors qu’aujourd’hui, le pays représente déjà 40% de ses revenus. Ce, grâce à la profondeur de son marché. « Il faut savoir que l’essentiel des déchets aux États-Unis vont dans des sites de stockage. Le territoire en compte 2.700 », rappelle-t-il.
Dans une revue du marché, Waga Energy estimait à « 20.000 le nombre de sites de stockage de déchets organiques » potentiellement équipables à l’échelle mondiale.
Mais elle n’est pas la seule à cibler le marché américain. En 2024, Air Liquide a annoncé deux nouvelles unités de production de biométhane à partir de déchets issus d’exploitations laitières, en Pennsylvanie et dans le Michigan et Total Energies s’est associé à Vanguard Renewable pour créer une coentreprise de production à partir de déchets industriels.
