« À la guerre, l’occasion n’attend pas. » Le Premier ministre israélien a repris à son compte la réflexion de l’historien grec Thucydide et lancé une attaque massive contre l’Iran. Voilà des décennies que Benyamin Netanyahou avait prévenu que l’État hébreu ne laisserait pas le régime des mollahs se doter de l’arme nucléaire.
Pris en flagrant délit de viol de ses propres obligations de non-prolifération par l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’Iran a offert une aubaine au chef du gouvernement israélien. Une occasion pour l’homme fort de Tel-Aviv de renverser la table alors qu’il était critiqué voire lâché par une partie croissante des dirigeants internationaux, dont Emmanuel Macron, réclamant en vain un arrêt de l’hécatombe à Gaza.
L’opération « Rising Lion » (« Lion qui se dresse ») menée par Tsahal et le Mossad a été conçue et mise en place de longue date sans que les services secrets iraniens s’en aperçoivent. Un coup audacieux parfaitement exécuté, digne des meilleurs films d’espionnage. En quelques heures, l’armée israélienne a décapité une partie de la chaîne de commandement iranien, éliminé neuf scientifiques chargés du programme d’enrichissement nucléaire de Téhéran et, pour finir, ébranlé cette République islamique qui terrorise le Moyen-Orient et le reste du monde depuis presque un demi-siècle.
L’Iran en perte de force ?
Au lendemain de l’attaque choc des Israéliens, le discours de mobilisation du Guide suprême Ali Khamenei promettant de « rendre le sionisme misérable » avait quelque chose de désespéré. La riposte baptisée « Promesse véridique 3 » a pris la forme d’une pluie désordonnée de missiles tombés sur le territoire hébreu. Certes, il y a beaucoup de blessés mais on est loin de « l’enfer » promis par Téhéran.
Preuve que la République islamique n’a plus la même force de frappe qu’il y a quelques années. L’Iran n’a plus le choix qu’entre de mauvaises solutions, car il est bien seul sur la scène internationale. Les pays arabes affichent une unité de façade. Ses alliés du Hamas et des milices chiites du Hezbollah ont été durement éprouvés par Israël. Moscou et Pékin ont d’autres chats à fouetter.
Le premier a déjà une guerre sur le feu en Ukraine et le second est engagé dans un bras de fer commercial face aux États-Unis. Personne n’ira donc pleurer sur
le sort de l’Iran, maintes fois mis en garde et qui n’a cessé d’ignorer les perches de négociation tendues par la communauté internationale. Y compris par Donald Trump, qui espérait obtenir rapidement un succès diplomatique en arrachant cet accord sur le nucléaire.
Dans ce contexte, il y a fort à parier que Benyamin Netanyahou va poursuivre son opération de pilonnage des installations nucléaires iraniennes encore quelques jours pour les neutraliser le plus possible. Son pari de la force semble irréversible, même si son rêve d’une reconfiguration de la géopolitique du Moyen-Orient paraît encore loin. Tout comme la chute espérée des mollahs.
Une chose est certaine : le cynisme des forts a balayé la diplomatie, d’autant qu’il est incarné et cautionné par les États-Unis, la Chine et la Russie. Partisan du multilatéralisme, Emmanuel Macron a apporté, bon gré mal gré, son soutien au Premier ministre israélien et a dû remballer son projet de conférence à l’ONU sur la création de deux États, Israël et Palestine. Une solution diplomatique aujourd’hui hors de portée, presque anachronique.
À lire également
Bruno Jeudy, directeur délégué de la rédaction