Kering n’a pas convaincu. Au lendemain de la nomination de Demna Gvasalia à la tête de Gucci, la marque phare du groupe, l’action de Kering chutait de plus de 13,52 % ce vendredi vers 10 heures, avant de remonter à -10,57 % vers midi, à 223 euros. « La sanction boursière est sévère », commente pour La Tribune, Emeric Blond, gérant actions chez Tailor AM.
Pourtant cette nomination surprise est censée relancer la marque italienne, dont les contre-performances plombent Kering, étant donné qu’elle représente entre la moitié des ventes de Kering et les deux tiers de son bénéfice opérationnel. Le créateur géorgien, à la tête de la maison Balenciaga depuis 2015, remplacera Sabàto de Sarno, qui a quitté la direction artistique de Gucci en février après seulement deux ans.
Gucci, l’homme malade de Kering
Il devra diriger une maison en difficulté puisque ses ventes ont baissé de 23 % en 2024, entraînant tout le groupe dont le bénéfice net s’est effondré de 62 % l’année dernière. Un très mauvais résultat pour une valeur du luxe, qui a vu son cours s’effondrer de plus de 47 % sur un an.
Comment expliquer la baisse d’activité de la maison florentine ? Après des années fastes entre 2015 et 2019, où son chiffre d’affaires a triplé, la tendance s’est inversée. En 2023, Gucci avait vu ses ventes reculer de 6 %. La marque qui s’est tournée vers les clients « aspirationnels » (d’entrée de gamme du luxe) « est exposée à une clientèle sensible aux problématiques inflationnistes et de baisse de pouvoir d’achat et qui ont diminué leurs achats de produits de luxe », expliquait en février à La Tribune Charles-Louis Scotti, analyste chez Kepler Cheuvreux, responsable de la recherche dans le secteur du luxe.
« Nous avons beaucoup poussé les produits expressifs et audacieux donc les clients à hauts revenus sont moins restés fidèles à Gucci. Ainsi, quand nous avons perdu les aspirationnels, nous n’avons pas eu le relais des hauts revenus», confie àLa Tribune, une source chez Kering.
Un réveil difficile qui a poussé le groupe à demander à Sabàto de Sarno de « recentrer Gucci sur ses fondamentaux », ajoute cette source.
Les investisseurs sceptiques
Après ce recentrage, Kering souhaite maintenant « redonner de la créativité à la marque », indique-t-on toujours chez Kering. Une mission confiée au nouveau créateur géorgien… qui n’a pas convaincu les investisseurs.
« La nomination de Demna peut surprendre car les investisseurs anticipaient un créateur externe très connu, ce que cette nomination ne semble pas offrir », a commenté Piral Dadhania, analyste chez Capital Markets. « Nous pensons que le marché recherchait un candidat poids lourd, capable de diriger et d’influencer avec des perspectives et des idées nouvelles, pour relancer la dynamique de la marque chez Gucci », a expliqué l’analyste. Reste que Demna Gvasalia « a réussi à relancer correctement la marque Balanciaga qui était vieillissante. C’est donc porteur d’espoir pour Gucci qui a besoin de fraîcheur », analyse Emeric Blond.
« Il est iconoclaste et ironique, ce qui est idéal pour attirer l’attention sur une petite marque comme Balenciaga, dont nous estimons le chiffre d’affaires à moins de 2 milliards d’euros. Cependant, nous ne sommes pas certains que cette stratégie fonctionnerait aussi bien pour une plus grande marque : elle va à l’encontre de l’objectif de vendre des exclusivités par millions », note, de leur côté, les analystes de Bernstein.
(Avec AFP)
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Maxime Heuze