Ce n’est pas un rapport d’austérité, mais bien d’efficacité, avertit la Cour des comptes. Dans une synthèse parue ce lundi, l’institution appelle à maîtriser le rythme des dépenses de santé qui s’élèvent à 265,4 milliards d’euros cette année. Et pour cause, l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam), qui assure le financement du système de santé, est passé de 2,4 % d’augmentation par an entre 2015 et 2019, à 4,8 % annuels ces dernières années. Une trajectoire qui conduit à doubler le déficit cumulé des trois branches de la Sécurité sociale d’ici à 2028 entraînant une situation « inédite » et « plus soutenable », estime la Cour des comptes, dans un contexte de vieillissement de la population et de hausse des maladies chroniques.
Certes, le gouvernement a bien tenté de réduire les dépenses dans son budget de la Sécu cette année de quelque 4 milliards d’euros, mais le déficit de la Sécu s’aggravera tout de même à 22 milliards d’euros estimés en 2025, contre 15,3 milliards d’euros cette année.
«Les coups de rabots de court terme ne suffisent plus et ne sont plus intelligents», s’agace Pierre Moscovici,premier président de laCour des comptes. « Nous ne pouvons pas continuer ainsi, sinon nous faisons fausse route et nous allons flinguer le modèle dans lequel nous sommes ».
La Cour des comptes propose donc 15 recommandations qui éviteraient autour de 20 milliards d’euros de dépenses.
Lutter contre les fraudes et les médicaments trop chers
Dans un premier temps, l’institution demande de resserrer les prises en charge des prestations en détectant davantage les fraudes pour un objectif d’économies d’environ 1,5 milliard d’euros en 2029. Elle recommande aussi de travailler sur la pertinence des soins alors que 265 000 hospitalisations auraient pu être évitées en 2017, soit 2,5 % des séjours hospitaliers totaux, avait averti la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees). La Cour des comptes cible de nouveau le dérapage des dépenses liées au transport sanitaire, en hausse de plus de 10 % en 2023, à 6,8 milliards d’euros.
L’institution demande également à revoir le prix de certains médicaments et dispositifs médicaux. C’est le cas notamment de ceux remboursés à hauteur de 15 % par l’Assurance maladie et dont le service rendu est dit « faible ». Elle pointe aussi du doigt le remboursement des cures thermales. « La France est l’un des derniers pays à le prendre en charge », constate Pierre Moscovici, avant de rappeler que l’Hexagone est l’un des pays qui appliquent le moins de reste à charge pour les patients. Certains traitements pourraient ainsi être payés intégralement par le patient ou être pris en charge par les complémentaires santé.
En outre, la Cour des comptes demande des politiques de prévention plus efficaces ainsi qu’un renforcement de la qualité et de l’efficience des établissements de santé. Surtout, il est nécessaire de faire un programme pluriannuel des dépenses, rappelle Pierre Moscovici, alors que l’ensemble des professionnels du secteur de la santé le demande depuis plusieurs années. Au gouvernement désormais de se saisir de cet enjeu de dépenses, selon le premier président de la Cour des comptes. « Les outils, les méthodes, tout est là. Il manque seulement un pilotage et une volonté politique », a-t-il conclu.
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