« Cette ligne est le cordon ombilical qui nous relie aux métropoles. Nous avons des atouts, un cadre de vie, une quiétude dont les gens sont friands. Mais encore faut-il pouvoir s’y rendre », alerte Frédéric Gineste. Le vice-président aux mobilités du département du Lot fait partie des centaines d’usagers et élus locaux des lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) et Paris-Clermont-Ferrand qui montent ce mardi à la capitale dans deux « trains de la colère » pour demander davantage d’investissements pour ces « lignes sinistrées ».
« Le matériel et les locomotives sont des épaves »
Ensemble, ils vont manifester à Paris et une délégation sera reçue dans l’après-midi par le ministre des Transports, Philippe Tabarot. Les habitants des départements ruraux desservis par la ligne observent une profonde détérioration du service. « Progressivement, le nombre de trains a diminué. À l’époque du Capitole (nom donné à cette ligne entre les années 60 et 90), 13 trains quittaient Paris. Aujourd’hui, sur les neuf trains qui partent d’Austerlitz, cinq s’arrêtent à Brive-la-Gaillarde, quatre autres s’arrêtent à Cahors, et trois arrivent à Toulouse. D’autant plus que quand le train est à l’heure, c’est presque une bonne nouvelle», retrace Frédéric Gineste.
Et le conseiller de décrire l’état de dégradation de cette ligne : « Le matériel et les locomotives sont des épaves. Les catenaires sont rouillés, les ballasts et les traverses ont plus de 40 ans. On est encore avec des rames Corail qui ont 40 ans, alors que le TGV est à sa quatrième génération. »
En 2018, un plan d’investissement d’1,6 milliard d’euros a bien été validé. Il en découle des travaux, dont certains vont avoir lieu à partir de cet été. Cette prochaine opération est évaluée à 133 millions d’euros par la SNCF. Mais pour Jean-Noël Boisseleau, vice-président urgence ligne Polt, cela ne suffit pas : « Des travaux pour régénérer la ligne ont bien été réalisés depuis six ans. Mai pour revoir les infrastructures, une signalisation, des catenaires, il faudrait au moins deux milliards supplémentaires. » Devant le ministre, les élus comptent aussi dénoncer « des livraisons de rames sans cesse repoussées qui exacerbent le sentiment de fracture territoriale et nourrit l’amertume et les colères. »
Un tissu économique fragilisé
La détérioration du service ferroviaire pénalise les entreprises lotoises à l’instar du géant de l’agroalimentaire Andros dont le siège social est établi à Biars-sur-Cère ou du spécialiste de l’habillage des parfums de luxe, Pivaudran, qui a des usines à Souillac. Les chefs d’entreprise locaux dénoncent la dégradation du service. « Il y a encore quelques années, je pouvais encore prendre le train de nuit et arriver à Paris de bonne heure pour aller directement en rendez-vous. Maintenant, cela n’existe plus. J’ai dû encore récemment prendre l’avion à Brive car les horaires ne correspondaient pas », pointe le directeur général d’une entreprise spécialisée dans la chaudronnerie basée à Mercuès, une commune à côté de Cahors.
Le déclin de cette ligne met surtout en danger tout un tissu social et économique. Le Lot souffre de la concurrence au nord de Brive-la-Gaillarde en Corrèze, doté d’un aéroport et au sud de Montauban (Tarn-et-Garonne), ville desservie par le TGV. « Qui choisirait de s’installer entre ces deux villes ? J’ai en mémoire une entreprise installée dans le Nord du Lot qui a préféré migrer vers Brive pour continuer à se développer », souffle le président de la CCI du Lot, Jean Hugon.