La Corée du Sud va mobiliser de grands moyens pour soutenir son industrie de semi-conducteurs. Ce mardi 15 avril, le gouvernement a annoncé qu’il subventionnera le secteur à hauteur de 23 milliards de dollars et que de nombreuses filières de formations – master, doctorats – seront prochainement créées. L’annonce n’est pas sans lien avec les tarifs douaniers de Donald Trump.
Alors qu’ils étaient pour le moment épargnés, les semi-conducteurs devraient finalement être les prochaines victimes de la guerre commerciale de Donald Trump. Le président américain a déclaré dimanche qu’il annoncerait cette semaine des droits de douane sur ces puces électroniques. « Les droits de douane seront en place dans un avenir pas trop lointain », a-t-il précisé. Concernant le montant exact, sa réponse est restée flou : « Je l’annoncerai dans la semaine » a-t-il rétorqué à des journalistes à bord de l’Air Force One. De son côté, Howard Lutnick, secrétaire au commerce, a parlé de taxes sur les puces dans « probablement un mois ou deux ».
Si les États-Unis conçoivent principalement les semi-conducteurs avec des entreprises comme Nvidia, Apple, Qualcomm ou encore Broadcom, ce sont surtout les pays asiatiques qui se chargent de leur production. Une situation loin de plaire à l’administration Trump, qui veut rapatrier la production sur le territoire américain : « Nos semi-conducteurs doivent être produits en Amérique », a notamment plaidé dimanche Howard Lutnick sur la chaîne ABC.
Les puces sont nécessaires dans de nombreux objets de la vie quotidienne comme les smartphones, les ordinateurs ou encore les voitures mais également dans des secteurs critiques comme la défense, l’énergie ou la communication. Néanmoins, la chaîne de valeur d’une puce est très fragmentée, et de nombreux pays interviennent à différentes étapes de sa création. Résultat : nombre d’entre eux vont être directement ou indirectement touchés par ces potentiels droits de douane. La Tribune passe en revue les principaux pays concepteurs et producteurs de puces.
Taïwan
Taïwan est l’un des plus grands fabricants de puces au monde. Et à l’heure de l’intelligence artificielle, les plus grands concepteurs américains comme Nvidia font fabriquer leurs puces dans le pays, notamment par le géant TSMC. L’île est de ce fait dans la ligne de mire de Donald Trump qui avait déjà menacé de les taxer à 100 %. Après les dernières menaces de Trump dimanche, TSMC a trébuché en Bourse de 2,7 %.
Pour calmer les véhémences du président, l’entreprise taïwanaise s’est pourtant entendue début avril avec le groupe Intel pour créer une coentreprise de fabrication de puces sur le territoire. Intel est depuis quelque temps dans la tourmente, un tel partenariat doit permettre à l’américain de rattraper son retard dans la production de semi-conducteurs.
La Corée du Sud
La Corée du Sud fait partie des plus grands fabricants mondiaux de puces avec des entreprises comme Samsung Electronics et SK Hynix. Des droits de douane pourraient lourdement impacter les entreprises du pays alors que la Corée du Sud a exporté pour plus d’1,1 milliard de dollars de dispositifs de semi-conducteurs d’après les données de Trademap (basées sur le code douanier 8 541).
Pourtant, courant décembre, le département américain du Commerce a investi 458 millions de dollars dans le projet d’usine d’emballage de puces du sud-coréen SK Hynix aux États-Unis. Un investissement qui atteint un montant total de 3,9 milliards de dollars, dans le cadre du Chips Act, le plan censé renforcer l’industrie des puces électroniques aux États-Unis.
Le Japon
Le Japon est l’un des plus gros exportateurs de « wafers », cette plaque très fine de matériau qui forme la base des semi-conducteurs, notamment à destination de Taïwan. Le Japon exporte ainsi plus de 745 millions de dollars de dispositifs de semi-conducteurs aux États-Unis, selon Trademap. Néanmoins, parmi les principales entreprises du pays insulaire, Advantest (+4,92 %) ou Sumco (+3,11 %) n’ont, eux, pas baissé en Bourse à la suite des déclarations de Donald Trump.
La Chine
Dans les cinq plus importantes fonderies de semi-conducteurs dans le monde figure le géant chinois SMIC pour Semiconductor Manufacturing International Corporation, d’après les chiffres de Statista.
En Asie, la Chine n’est pas le pays le plus avancé dans le secteur des puces électroniques. Elle a davantage un rôle d’assemblage et utilise surtout les puces dans les équipements électroniques qu’elle produit. Elle est, de ce fait, l’un des plus gros importateurs de semi-conducteurs. Une situation rendue difficile par les nombreuses sanctions américaines. Encore en mars, le département du Commerce a ajouté de nouvelles entreprises sur sa liste de sociétés où les exportations de semi-conducteurs doivent être limitées voire interdites. Une décision justifiée par des enjeux de sécurité nationale. La Chine avait, elle, déjà restreint les exportations de matériaux ou encore de composants essentiels (gallium, germanium, antimoine…) à la fabrication de ces puces, en réponse à de précédentes sanctions.
L’Union européenne
L’Europe est, de son côté, dépendante des importations en semi-conducteurs, notamment de l’Asie de l’Est. Néanmoins, en 2023, l’UE possède près de 12,7 % de part de marché dans le monde, d’après la SIA, l’association de l’industrie des semi-conducteurs. Pour se renforcer dans le secteur, les Européens ont même déployé le European Chips Act, qui vise à atteindre 20 % du marché d’ici 2030. « L’Europe joue un rôle plus limité et se positionne sur des marchés très spécialisés, sur lesquels la robustesse et la fiabilité des produits sont des facteurs plus importants que la puissance de calcul », pointe dans un rapport Bercy.
Parmi les champions européens de fabricants de puces se trouvent le franco-italien STMicroelectronics ou encore l’Allemand Infineon Technologies. En 2024, l’Union européenne a importé des États-Unis pour plus de 430 millions d’euros de dispositifs de semi-conducteurs, et a exporté plus d’un milliard d’euros de produits, d’après des chiffres d’Eurostat.
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