Donald Trump persiste et signe. Alors qu’un consortium américain mené par le gestionnaire d’actifs BlackRock s’apprête à racheter deux ports proches du canal de Panama au géant hongkongais Hutchison, le président américain a déclaré au Congrès que les États-Unis allaient « reprendre » la voie d’eau pour « renforcer encore notre sécurité nationale ».
Washington ne cesse de dénoncer, depuis le retour au pouvoir de Donald Trump en janvier, une supposée emprise chinoise sur le canal de Panama. « La Chine exploite le canal de Panama, et nous ne l’avons pas donné à la Chine, nous l’avons donné au Panama. Et nous allons le reprendre », avait déjà annoncé le républicain en janvier lors de son discours d’investiture. Washington a également considéré comme une « menace » le fait qu’une entreprise liée à la Chine exploite des ports aux abords du canal.
En réalité, le canal est géré et administré par l’Autorité du canal de Panama, un organisme indépendant créé par la Constitution panaméenne.
« Une transaction de nature purement commerciale »
« Je voudrais insister sur le fait que la transaction est de nature purement commerciale et totalement sans rapport avec les récentes informations de presse en matière politique concernant les ports du Panama », a néanmoins relevé Franck Sixt, un responsable de CK Hutchison, cité dans le communiqué.
« Cette transaction est le fruit d’un processus rapide, discret mais compétitif, au cours duquel de nombreuses offres et marques d’intérêt ont été reçues », a-t-il précisé. Il a également indiqué que l’audit entamé par les autorités panaméennes, destiné à vérifier qu’Hutchison Ports PPC (aussi connue sous le nom de Panama Ports Company), la filiale qui exploite actuellement ces ports, respecte ses engagements financiers, « doit se poursuivre ».
Dans la même veine, le gouvernement panaméen a réagi en insistant, dans un communiqué, sur le fait« qu’il s’agit d’une transaction mondiale, entre entreprises privées, motivée par des intérêts mutuels ».
Le consortium américain, constitué également de Global Infrastructure Partners (GIP) et de la société Terminal Investment, a prévu de débourser près de 19 milliards de dollars, en incluant une dette nette de 5 milliards de dollars, selon une communication faite mardi. Les parties sont entrées dans une période de négociations exclusives de 145 jours, ont-elles précisé dans un communiqué commun.
L’action de CK Hutchison a bondi de 25 %
En vertu de l’accord de principe, le consortium doit mettre la main sur 90 % de PPC, qui détient et exploite les ports panaméens de Balboa et de Cristobal, ainsi que sur 80 % d’une filiale détenant et exploitant 43 ports dans vingt-trois autres pays. En revanche, le groupe CK Hutchison doit conserver HPH Trust, société opérant les ports de Hong Kong, de Shenzhen ainsi que d’autres infrastructures portuaires chinoises, a précisé le communiqué.
Le marché a d’ailleurs accueilli l’opération avec enthousiasme : l’action de CK Hutchison a bondi jusqu’à 25 % mercredi à la Bourse de Hong Kong, les analystes jugeant que le groupe pourrait désormais utiliser ces nouveaux fonds pour élargir son portefeuille vers des actifs moins sujets aux tensions géopolitiques.
« Cet accord offre une puissante illustration de la plateforme créée par le regroupement de BlackRock avec GIP et de notre capacité à proposer des investissements diversifiés à nos clients », a commenté de son côté Larry Fink, patron de BlackRock, cité dans le communiqué.
CK Hutchison est un immense empire commercial, fondé par le milliardaire hongkongais Li Ka-shing. Sa filiale Hutchison Ports PPC gère depuis 1997 le port de Cristobal, du côté atlantique du canal, et celui de Balboa, du côté pacifique. Elle a obtenu une première concession de 25 ans, prolongée de 25 ans en 2021.
Le canal, construit par les États-Unis et inauguré en 1914, est passé sous contrôle panaméen en 1999 dans le cadre de traités bilatéraux négociés sous le mandat du président démocrate Jimmy Carter. Les États-Unis et la Chine sont les deux principaux utilisateurs de ce passage reliant les océans Pacifique et Atlantique, par lequel transite 5 % du commerce maritime mondial.
(Avec AFP)
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