[Article publié le lundi 10 mars 2025 à 14h27, mis à jour à 15h21] Fermé pour travaux. ArcelorMittal va mettre à l’arrêt son principal haut-fourneau de Dunkerque (Nord) pendant près de trois mois, dans le cadre d’un programme d’investissement de 254 millions d’euros sur le site. Les travaux vont concerner la chaîne d’agglomération (où la matière première alimentant les hauts-fourneaux est préparée), le haut-fourneau 4, considéré comme le plus gros d’Europe, ainsi qu’un convertisseur de l’aciérie.
Le haut-fourneau sera ainsi complètement arrêté à compter du 15 avril pendant 75 jours, puis relancé pendant une quinzaine de jours, jusqu’à atteindre à nouveau sa pleine capacité de production. Ces travaux « permettront de maintenir l’efficacité de ces outils (…) et améliorer leurs fonctionnalités, tout en préparant le site industriel à sa prochaine phase de décarbonation », explique le groupe dans son communiqué.
Des travaux prévus «quoi qu’il en soit»
ArcelorMittal a suspendu fin 2024 ses plans d’investissements dans la décarbonation en Europe, notamment à Dunkerque où il avait prévu d’investir 1,8 milliard d’euros avec une aide d’État de 850 millions d’euros. Les opérations de maintenance du haut-fourneau 4 n’ont pas de rapport avec la suspension de ce méga investissement, a précisé ce lundi la communication d’ArcelorMittal France à l’AFP.
« Ces travaux de maintenance majeurs du HF4 auraient eu lieu quoi qu’il en soit », selon la communication, soulignant que cet arrêt a été préparé par« une montée des stocks en interne et en faisant livrer des brames d’autres sites d’ArcelorMittal ».
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Par ailleurs, début janvier, le site de Dunkerque, qui s’étend sur 450 hectares et emploie 3 200 salariés, avait été touché par un incendie, dans la cokerie. Un syndicaliste avait alors dénoncé le manque d’investissements sur le site.
C’est en substance le même discours qu’a tenu ce lundi le secrétaire général de la CGT ArcelorMittal à Dunkerque ce lundi. Pour Gaëtan Lecocq, ces annonces ne correspondent pas à des investissements de long terme mais à « des rustines sur le haut-fourneau n°4, parce qu’il est en fin de vie, pour qu’il tienne, dans le meilleur des cas, jusque 2029 ». Initialement, ArcelorMittal « devait investir à peu près un demi-milliard d’euros pour que (HF4) tienne jusqu’en 2050 », date à laquelle le groupe avait annoncé vouloir atteindre la neutralité carbone, a-t-il rappelé auprès de l’AFP.
La CGT, rejoints par les autres syndicats selon son représentant, « a réussi à déclencher » une procédure de « droit d’alerte économique ». Celle-ci prévoit de mandater un cabinet d’expertise extérieur « pour analyser les comptes, tous les documents auxquels on n’a pas accès », afin de savoir « exactement à quelle sauce on va être mangé », a précisé Gaëtan Lecocq.
Crise de l’acier en Europe
Plus généralement, le secteur de l’acier européen est plongé dans un contexte d’incertitude. Les entreprises, qui emploient 310 000 personnes sur le continent, sont fortement fragilisées. Car en Europe, la demande d’acier a chuté de 25 % ces cinq dernières années.
Des fermetures de sites majeurs sont envisageables « dans les 12 à 18 mois » si rien n’est fait, indique-t-on dans l’entourage du ministre français de l’Industrie Marc Ferracci. Sur les douze derniers mois, le gouvernement français a recensé la fermeture de « cinq hauts fourneaux de production d’acier primaire en Europe centrale ». « Des baisses de cadence sont observées en Allemagne, en Roumanie, en Hongrie, la plus grande aciérie tchèque a été déclarée en faillite et, en Allemagne, ThyssenKrupp a annoncé la suppression de 11 000 postes », ajoute-t-on.
En février, ArcelorMittal a dit, lui, envisager la délocalisation de certaines de ses activités support d’Europe vers l’Inde. « L’industrie européenne de l’acier est confrontée à un certain nombre de défis majeurs qui menacent l’avenir de la production d’acier sur le continent », a auparavant déclaré le groupe.
Premier responsable : la panne du secteur de la construction et l’atonie de celui de l’automobile, les deux principaux acheteurs d’acier en Europe. De plus, l’acier européen est confronté à un quadruple problème qui se cristallise en menace existentielle : une concurrence massive d’acier chinois à bas prix, la menace de relèvement des droits de douane de Donald Trump sur l’acier aux États-Unis, des prix de l’énergie en Europe très supérieur à celui des autres continents, et des coûts de décarbonation en hausse.
(Avec AFP)
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