Deux offres étaient en concurrence pour la reprise de l’armurier stéphanois Verney-Carron, placé en redressement judiciaire en février dernier : celle de la puissante manufacture d’armes belge FN Browning et ses quelques 930 millions d’euros de chiffre d’affaires, et celle du ligérien Rivolier (320 salariés, 150 millions d’euros de chiffre d’affaires), distributeur notamment d’armes et équipements pour les forces de l’ordre et l’armée française.
Le Tribunal de commerce a tranché ce mercredi après-midi : c’est l’offre de Rivolier qui a été retenue, et ce malgré les recommandations de plusieurs des acteurs du dossier à l’occasion de l’audience qui s’était tenue mercredi dernier.
Selon le délibéré, dont La Tribune a pu prendre connaissance, l’administrateur judiciaire avait mis en avant la sécurité financière apportée par FN Browning, même si « son choix du cœur » était stéphanois et donc celui de Rivolier. Les Belges avaient aussi obtenu le soutien du mandataire judiciaire, de l’actionnaire sortant (Cybergun), du représentant de l’AGS-CGEA (le régime de garantie des créances des salariés), et plus important encore de la représentante du Parquet.
La position de cette dernière était attendue des observateurs dans un contexte de réarmement de la France et d’économie de guerre. Toujours selon le délibéré, celle-ci avait souligné la solidité des deux offres, mais estimait la pérennité de l’entreprise mieux garantie par le projet FN Browning. Les représentants des salariés n’avaient, quant à eux, pas pris position estimant les deux offres très solides.
Malgré ces recommandations, le Tribunal de commerce a donc choisi une autre voie, celle de l’ETI française Rivolier. Sa décision s’appuie sur deux points principaux : la « très bonne connaissance de la société Verney-Carron, de ses produits, de ses compétences », par Rivolier et le fait que celui-ci soit français. « Le Tribunal tient à ce que le patrimoine, le savoir-faire, les marques et autres droits de propriété intellectuelle, (…) dans le secteur stratégique de la filière armurière soient conservés en France et plus particulièrement à Saint-Etienne ».
55 salariés repris
Au final, 55 des 67 salariés sont repris par Rivolier. Le bâtiment n’étant pas intégré à l’offre, Rivolier va le louer pendant trois ans, avant d’investir dans un nouveau site, toujours sur le territoire stéphanois, ou à proximité immédiate. Rivolier, dans ce projet, s’appuie sur un partenariat (dont il est majoritaire à hauteur de 65%) avec le family office tchèque RSBC. Celui-ci possède déjà le fabricant d’armes de petit calibre slovène Arex depuis 2024 et le fabricant d’armes autrichien Steyr depuis 2020.
« Cette décision du Tribunal de commerce nous honore et nous oblige », a réagi à chaud Arnaud Van Robais, le président de Rivolier. « Notre première action va être de faire revenir tout le monde au travail. Nous avons des carnets de commandes à exécuter. Il va falloir aussi redonner confiance à nos fournisseurs et à nos clients. Le salon de l’arme de chasse Game Fair, la semaine prochaine, sera l’occasion de faire nos premiers pas ».
Le nouvel actionnaire de Verney Carron, déjà distributeur exclusif de Verney-Carron depuis plusieurs années, évoque ainsi une commande de 3 000 lanceurs Cobra à honorer pour les forces de l’ordre française et 650 flashball pour des policiers municipaux. Concernant le sujet de la défense, Arnaud Van Robais évoque un « travail en profondeur » à réaliser pour avancer sur ce marché difficile sur lequel Verney-Carron n’a, pour l’heure, pas encore réussi à s’ancrer. « Il va falloir reprendre les bases, travailler en amont avec la DGA notamment, afin de développer des produits qui correspondent vraiment à la demande ».