Au Liban, à moins de cinq kilomètres de la frontière syrienne, dans la plaine de la Bekaa, une mosquée aux hautes coupoles dorées sert de centre de réfugiés pour d’anciens soldats de l’ex-dictateur Bachar al-Assad et pour des Syriens alaouites. Tous redoutent les représailles du nouveau régime syrien et ont fui un pays en pleine crise sécuritaire, où les exécutions sommaires contre leur communauté se multiplient.
Les tatouages sur les mains de Fairouz remontent jusqu’à son cou. Son regard est luisant, apeuré, mais semble masquer un brin de folie. C’est un ancien soldat de Bachar al-Assad. Après la chute du dictateur et de Damas le 8 décembre 2024, il est venu se réfugier dans la plaine de la Bekaa, au nord-ouest du Liban, où il a été accueilli par ses pairs chiites du Hezbollah. Fairouz était en charge des relations entre l’armée syrienne et les forces du Hezbollah libanais. Il est populaire ici, recherché en Syrie. Sa réputation lui offre la meilleure tente, à l’écart des autres familles chiites syriennes, entassées par dizaines dans une mosquée transformée en camp de réfugiés.
« Le seul crime que nous ayons commis a été de nous défendre contre les terroristes », déclare-t-il d’emblée pour justifier les crimes du régime de Bachar al-Assad. Sa foi dans le dictateur et criminel de guerre réfugié en Russie est intacte : « Bachar protégeait la communauté chiite. Je me sentais en sécurité. J’avais la belle vie. » Pour Fairouz et nombre de ses compagnons d’exil, le nouveau pouvoir syrien sunnite n’est qu’un prolongement d’Al-Qaida, une perception enracinée dans les anciennes affiliations du groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS). HTS a officiellement rompu ses liens avec Al-Qaida en 2016. Cette rupture, approuvée par le chef d’Al-Qaida de l’époque, Ayman al-Zawahiri, visait à présenter le groupe comme une organisation strictement syrienne, cherchant à se rapprocher des autres factions rebelles. Cette évolution souligne la complexité des dynamiques internes de la rébellion syrienne.