Tandis que la France accélère dans l’urgence son réarmement face à la menace russe, « Scorpion », le programme phare de l’armée de terre, connaît quelques déboires. À 5 millions d’euros l’unité, son blindé de reconnaissance et de combat Jaguar n’est toujours pas opérationnel. Pis, il est dépourvu de dispositif de lutte antidrone. Enquête sur le cauchemar de la Direction générale de l’armement.
« L’avantage avec “Scorpion”, c’est qu’il y a toujours quelque chose qui fonctionne », sourit, mi-figue, mi-raisin, le patron de la Direction générale de l’armement (DGA), Emmanuel Chiva, devant un parterre de militaires et d’industriels conviés à l’Hôtel des Invalides, en ce soir de novembre 2024. Coupe de champagne à la main, ce bel aréopage célèbre les 10 ans de « Scorpion », le programme phare de l’armée de terre lancé en décembre 2014, pour un montant estimé à 5 milliards d’euros, alors que les soldats partaient en opération avec des matériels à bout de souffle. « L’épine dorsale du combat terrestre pour les prochaines décennies », telle était l’ambition qui lui était assignée par l’ancien ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian.
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Dix ans plus tard, si les livraisons s’accélèrent, la principale composante du programme, un blindé répondant au petit nom de Jaguar, cumule les dysfonctionnements. Tourelle non stabilisée, clim intermittente, incertitude des tirs en mouvement sur cible mouvante, électronique défaillante, calculateur de bord saturé… « Sur le Jaguar, on ne peut pas utiliser en même temps le sèche-cheveux de madame et le rasoir électrique de monsieur », raillent, en substance, des officiers supérieurs.