Depuis le dernier trimestre 2024, les cours du café ont un goût amer. L’Arabica s’échange à des niveaux records jamais égalés depuis un demi-siècle et, de l’avis des négociants, la situation n’est pas près de s’arranger : effets notables du changement climatique (sécheresse au Brésil) questionnant la pérennité de la filière, recul de l’euro face au dollar, augmentation de la demande (6 % en 2024) face à une offre réduite, contraintes géopolitiques (blocage du Canal de Suez rallongeant délais et coûts de livraison), etc. Les causes sont multiples.
Selon Thomas Bertrand, P-dg des Cafés Bibal (35 millions d’euros de chiffre d‘affaires, 200 collaborateurs, production de 600 tonnes par an) dans l’Hérault, « l’explosion des cours de café est structurelle, il n’y aura pas de retour en arrière, d’autant que la diminution des stocks va se traduire inexorablement par une nouvelle hausse des prix ». Certains produits ont déjà plus que doublé. Pour autant, le café continue de rester la boisson chaude la plus consommée en France, avec plus de 70 millions de tasses de café bues chaque jour. Dans un contexte concurrentiel, les acteurs doivent sans cesse innover.
Des performances cognitives
Créés il y a 70 ans, Cafés Bibal, dont l‘usine de torréfaction est basée à Saint-Aunès, travaille depuis plusieurs mois sur une nouvelle gamme de café enrichie aux champignons adaptogènes. Très en vogue, notamment sur les réseaux sociaux, ces champignons utilisés dans la médecine chinoise ancestrale sont supposés augmenter la capacité du corps et de l’esprit à s’adapter au stress et à équilibrer les fonctions physiologiques. Bienfaits avérés ? Effet plafebo ? Marketing ? Toujours est-il que ce marché, estimé à près de 30 milliards de dollars, pourrait atteindre le double d’ici 2030.
« Des étude scientifiques corroborent les principes actifs de ces champignons, assure Thomas Bertrand. Il existe aujourd’hui des gommes à mâcher, des teintures ou des substituts de café mais nous allons être les premiers à assembler un café 100% Arabica du Guatemala à un extrait de Crinière de Lion, réputé pour ses effets bénéfiques sur la concentration et les performances cognitives. »
Après le lancement de ce nouveau café, prévu en juin 2025, trois autres variétés de champignons complèteront la gamme : cordyceps (propriétés énergisantes) assemblé à du Robusta, reishi (détente) marié à du décaféiné, et shaga (antioxydant) assemblé à un café éthiopien. Pour son approvisionnement, le torréfacteur a fait appel à la toute jeune société montpelliéraine Mushie.
« Sans parler de l’empreinte carbone de l’Asie, le sourcing y est peu fiable, voire assez opaque et sans qualité de suivi sanitaire, assure Alice Rozoy, fondatrice de Mushie. Je me suis donc rapprochée de cultivateurs français répondant à un strict cahier des charges. Les champignons poussant très vite, ce ne sera pas compliqué de proposer un sourcing toute l’année. »
6.000 distributeurs automatiques
Ce premier Arabica enrichi à la Crinière de Lion sera vendu sur internet et auprès des professionnels notamment en boutiques ou dans le réseau des cafés-hôtels-restaurants (CHR) au prix de 0,50 centimes la capsule.
En parallèle, Bibal se concentre sur son parc de 6.000 distributeurs automatiques. Ce secteur, qui lui permet de maîtriser ses marges, représente désormais 70 % de son activité et devrait encore augmenter avec une série d’opérations de croissance externe.
Historiquement implanté sur la côte méditerranéenne, de Perpignan à Nîmes, Cafés Bibal veut aussi poursuivre, d’ici 2026, son développement territorial vers la Côte d’Azur puis la région Rhône-Alpes. Une vingtaine de collaborateurs vont venir renforcer les effectifs, sur des fonctions supports et commerciales. Malgré un contexte tendu, l’entreprise annonce une croissance organique de son chiffre d’affaires de 15 % pour 2025 et cherche de nouveaux locaux pour absorber son développement.