Comment favoriser la diversité et l’inclusion dans le monde du travail ? Les réponses à cette question au centre de la consultation nationale initiée et menée par la plate-forme Make.org et France Travail du 9 décembre 2024 au 28 février dernier, dont La Tribune est partenaire, ont été révélées, ce matin, au siège de L’Oréal à Levallois-Perret. Cette consultation a recueilli 2 278 propositions citoyennes, et 305 890 votes exprimés par 130 061 citoyens et citoyennes. Une mobilisation inédite en plein débat sur ces sujets venu d’outre-Atlantique.
Alors que Le Figaro dévoilait le 28 mars une lettre adressée par l’administration Trump à des entreprises Françaises leur intimant de s’engager par contrat à cesser leur politique de lutte contre les discriminations s’ils veulent continuer à travailler avec le gouvernement, la question d’un monde professionnel plus inclusif semble intéresser les Français mais aussi les diviser. L’analyse de cette consultation pointe également l’absence de références à divers types de discriminations révélant de nombreux angles morts dans le débat.
5 axes prioritaires à développer
Parmi les pistes d’actions jugées prioritaires par les Français on trouve le recrutement et l’accès à l’emploi, la sensibilisation et la formation à l’inclusion, l’accompagnement et l’adaptation des conditions de travail, la gouvernance et les politiques internes, ainsi que le cadre légal et les actions contre la discrimination.
Pas moins de 546 propositions ont été formulées autours de 13 idées avec, pour celles qui obtiennent une adhésion massive : une meilleure intégration et valorisation des seniors, une meilleure accessibilité pour les personnes en situation de handicap, notamment ceux en situation de handicap invisible et la valorisation des parcours atypiques. Le mentorat intergénérationnel et l’assouplissement des conditions de travail, notamment via le télétravail et les horaires aménagés, figurent aussi parmi les priorités. La sensibilisation dès l’école à la diversité et au handicap est également vue comme une solution essentielle pour briser les stéréotypes dès le plus jeune âge.
Un sujet à contreverses
Toutefois, cette consultation met en lumière aussi de vifs désaccords sur certaines propositions. Les 12 idées controversées illustrent les tensions existantes, notamment sur l’imposition de quotas pour la diversité en entreprise, la création d’un système national de signalement des discriminations ou encore l’intégration systématique des politiques de diversité dans toutes les stratégies d’entreprise.
Certains participants jugent ces mesures nécessaires pour lutter contre les discriminations, tandis que d’autres dénoncent une ingérence excessive dans la gestion des entreprises. De même, la visibilité des enjeux LGBTQI+ au travail divise les avis : si certains y voient une avancée, d’autres considèrent que cela relève de la sphère privée. Le critère de compétence est privilégié par les citoyens par rapport aux caractéristiques personnelles (genre, âge, origine)
Des thèmes absents du débat
Enfin, si les thèmes du handicap et des seniors apparaissent particulièrement représentés, certaines discriminations sont moins ou pas visibles. Les discriminations sur les mœurs, la religion, les opinions, le lieu de résidence, la situation économique n’ont pas été mentionnés au sein de cette consultation, posant ainsi les limites de l’exercice et la nécessité de poursuivre les efforts de sensibilisation sur l’ensemble de ces questions. Des silences qui méritent d’être étudiés et compris pour améliorer l’analyse de la volonté citoyenne.
D’un large consensus sur la nécessité d’un monde du travail plus inclusif à la révélation des divergences sur les moyens d’y parvenir, cette consultation démontre la complexité de l’engagement citoyen sur ces sujets. Entre approche incitative et cadre législatif plus contraignant, la question de la diversité et de l’inclusion professionnelles apparaît à la fois essentielle et source de débat.
Pour aller plus loin : le rapport de la consultation sera disponible dès le 3 avril sur la plateforme Make.org.
Cette consultation est organisée dans le cadre de la Grande Cause Diversité & Inclusion, un programme d’intérêt général de trois ans soutenu par des partenaires entreprises et plus de 70 partenaires associatifs experts. Après la restitution des résultats, des ateliers de concertation pour transformer ces consensus citoyens en actions concrètes seront menés. Make.org invitera les 15, 16 et 22, 23 avril prochains, les citoyens ayant participé à la consultation et les partenaires (associations, entreprises, institutions, experts, médias…) à ces journées de co-construction d’actions. Un appel à projets auprès des associations permettra aussi de sourcer des projets cohérents avec la volonté citoyenne. À l’issue de ce processus participatif, 6 et 8 actions concrètes pour favoriser une inclusion réelle dans le monde du travail constitueront le plan d’actions de la société civile. Ces actions seront incubées, développées et expérimentées sur le terrain, avec l’appui de Make.org Foundation, et déployées à l’échelle nationale.
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Sophie Iborra