Cachée dans les dernières pages d’un rapport technique publié mardi 20 mai par les douanes françaises, une information cruciale aurait pu passer sous les radars : face aux droits de douane américains, tous les pays européens ne sont pas logés à la même enseigne. Bonne surprise pour la France, qui fait partie des pays les moins impactés par les taxes américaines mises en œuvre par Donald Trump.
Les États-Unis ont annoncé le mois dernier une surtaxe de 20 % sur les importations des pays de l’Union européenne, avant de faire baisser temporairement cette taxe à 10 % pour 90 jours. Certaines marchandises sont épargnées de droits de douane, comme les produits pharmaceutiques, mais d’autres – notamment l’automobile, l’acier et l’aluminium – sont à l’inverse toujours frappés de plein fouet, avec des taxes pouvant atteindre 25 %.
Ces différences de taxation, allant de 0 à 25 % selon les produits, ont permis aux douanes françaises d’établir un bilan chiffré des impacts économiques, pays par pays. La France s’en sort mieux que la moyenne européenne, et figure parmi les économies les moins affectées.
La France relativement épargnée
Avec un taux de droits de douane additionnels moyen à 9,6 %, la France se situe légèrement au-dessus de la moyenne européenne (9,5 %). Le taux de droits de douane additionnels moyen reflète concrètement un taux consolidé, tenant compte de la surtaxe de 10 % appliquée à l’ensemble des produits, et des 25 % imposés sur l’automobile, l’acier et l’aluminium.
Et la France s’en sort relativement mieux que certains de ses voisins européens qui subissent plus lourdement les surtaxes américaines : 22,1 % pour la Slovaquie, 18,3 % pour la Hongrie et 12,3 % pour l’Allemagne.
La surtaxe automobile
Les mauvaises performances de certains pays européens, comme la Slovaquie ou la Hongrie, s’expliquent en grande partie par la surtaxe de 25 % imposée par les États-Unis sur les produits automobiles. « C’est cette surtaxe automobile qui a le plus aggravé l’impact réel des droits de douane pour plusieurs pays », explique Yann Ambach, chef du bureau de la politique tarifaire et commerciale à la Direction générale des Douanes et Droits Indirects.
La Slovaquie en est l’exemple type : 80 % de ses exportations vers les États-Unis concernent des véhicules ou des pièces détachées. Le pays exporte peu vers les États-Unis, mais l’essentiel de ses exportations étant basé sur l’automobile, la Slovaquie se retrouve fortement pénalisée par les droits de douane américains.
Même constat pour l’Allemagne. « L’industrie allemande reste très exposée car elle fabrique encore une grande partie de ses véhicules sur son sol », souligne Yann Ambach. Les chiffres sont sans appel : 27 % des exportations allemandes vers les États-Unis sont liées à l’automobile, contre seulement 4 % pour la France. Surtaxer l’automobile revient à ainsi à toucher l’Allemagne en plein cœur. Cette différence explique en grande partie pourquoi la France s’en sort mieux dans le classement, mais ce n’est pas le seul facteur.
Une production étroitement imbriquée avec celle des États-Unis
À l’inverse de ses voisins européens, la France est relativement épargnée par les droits de douane américains, notamment parce qu’elle exporte peu de produits finis, en particulier dans l’automobile. « Contrairement à l’Allemagne ou à la Slovaquie, la France a une industrie très interconnectée, notamment dans l’aéronautique et l’aérospatial. Elle exporte moins de produits finis vers les États-Unis », poursuit Yann Ambach.
L’un des exemples les plus parlants : les avions. Une partie des aéronefs est fabriquée en France, l’autre directement aux États-Unis, ce qui atténue l’impact des droits de douane. Sachant qu’un produit exporté sur cinq vers les États-Unis appartient au secteur aéronautique et spatial, soumis à une taxe limitée à 10 %. Viennent ensuite les boissons, également taxées à 10 %, puis les produits pharmaceutiques totalement exemptés de droits de douane.
En revanche, « c’est un raisonnement macroéconomique qui explique la bonne position de la France, mais attention : certaines filières sont beaucoup plus exposées que d’autres », nuance Yann Ambach. Les vins et spiritueux, par exemple, restent particulièrement vulnérables aux mesures tarifaires américaines.
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Valentine Roux