Exporter vers les États-Unis coûte désormais plus cher. Et ce, depuis que Donald Trump a augmenté les droits de douane de 10 % contre les produits de l’ensemble des pays du globe – et même plus pour certains biens comme l’acier et l’aluminium (25 %). Un chiffre qui pourrait être bien plus élevé si le président américain se décidait finalement à mettre sa menace à exécution d’instaurer des droits de douane réciproques, une mesure en pause depuis le 9 avril dernier pour 90 jours.
L’un des buts affichés par le milliardaire au pouvoir est d’inciter les industriels à (re)localiser leur production sur le sol américain. Reste que les effets à long terme de cette politique sont imprévisibles. « Chacun va se poser la question : est-ce plus compétitif de produire aux États-Unis, avec un marché devenu plus faible, ou de payer des droits de douane ? », a récemment résumé auprès de l’AFP Guillaume Crunelle, du cabinet Deloitte. Certains ont néanmoins déjà tranché.
Les constructeurs automobiles dans lesstarting-blocks
Parmi eux, de nombreux constructeurs automobiles. Il faut dire que le secteur est soumis depuis début avril à des droits de douane supplémentaires de 25 % – qui doivent être étendus dès le 3 mai aux pièces détachées de l’industrie.
Il y a ceux qui ont déjà officialisé leur choix, comme le nippon Honda. Il a annoncé ce mercredi relocaliser la production de son modèle hybride Civic du Japon aux États-Unis, plus précisément dans son usine située en Indiana. Son homologue Nissan, qui comptait arrêter la production de son SUV Rogue dans son usine du Tennessee, va finalement la maintenir pour éviter les surtaxes américaines. Quant au suédois Volvo, il a confirmé qu’il allait augmenter sa production dans son usine de Caroline du Sud, et peut-être y transférer un nouveau modèle.
D’autres tergiversent encore. À l’instar de l’allemand BMW, qui envisage d’accroître de 80 000 unités la capacité de production de son usine installée, elle aussi, en Caroline du Sud. Discussion similaire chez son confrère Mercedes, qui pourrait en plus déplacer la production d’un de ses modèles en terre américaine. Idem pour une partie de la production de moteurs du britannique Rolls-Royce.
LesBig Pharmacèdent à Trump et menacent l’Europe
Le géant pharmaceutique suisse Novartis a annoncé la semaine dernière un investissement de 23 milliards de dollars aux États-Unis sur cinq ans, pour y fabriquer les principaux médicaments destinés aux patients américains. Son concurrent direct, Roche, a également fait savoir qu’il envisageait de nouveaux investissements outre-Atlantique, pour « continuer à répondre aux besoins des patients américains », selon le média helvétique Blick.
Trois groupes américains ont aussi fait des annonces en la matière ces dernières semaines afin de renforcer leur production aux États-Unis. Quatre nouveaux sites seront construits par Eli Lilly, pour un total de 27 milliards de dollars (23,7 milliards d’euros), quand Johnson & Johnson va débloquer 55 milliards de dollars (48,4 milliards d’euros) sur les quatre prochaines années. Merck a, de son côté, inauguré une usine de fabrication de vaccins en Caroline du Nord, un projet évalué à 1 milliard de dollars (880 millions d’euros).
D’autres pourraient leur emboîter le pas. Les patrons de 32 laboratoires pharmaceutiques – dont Roche, Eli Lilly, Merck, le danois Novo Nordisk, les français Sanofi et Servier – ont lancé un avertissement à la Commission européenne la semaine dernière. Dans un courrier, ils ont réclamé certaines conditions pour empêcher « l’exode » des investissements du secteur vers les États-Unis, parmi lesquelles un marché européen plus compétitif. Sans cela, « d’ici à trois mois, 16,5 milliards d’euros d’investissements prévus pourraient être transférés hors d’Europe », ont-ils prévenu.
Les produits pharmaceutiques sont pour l’heure exemptés de droits de douane imposés par Washington, car considérés comme des biens essentiels. Mais cette exception pourrait ne pas durer, Donald Trump ayant déjà laissé planer le doute à ce sujet.
Les industriels aussi sont sur le pont
Du côté de l’industrie lourde, les annonces se sont multipliées ces dernières semaines. Plusieurs d’entre elles ont eu lieu avant que le président américain ne lance pleinement sa guerre commerciale, mais difficile de ne pas y voir de lien, Donald Trump ayant fait de l’augmentation des droits de douane l’une de ses promesses lors de la campagne pour l’élection présidentielle à l’automne dernier.
Ainsi, le sidérurgiste ArcelorMittal, basé au Luxembourg, a indiqué début février investir près d’un milliard de dollars (environ 880 millions d’euros) dans une nouvelle usine de production d’acier en Alabama, où il est déjà implanté.
Le géant français des matériaux Saint-Gobain, a annoncé le même mois un investissement de 40 millions de dollars (35,2 millions d’euros) pour la construction d’une usine dans l’État de New York. Un projet toujours d’actualité. Le groupe l’a confirmé début avril auprès de l’AFP, arguant qu’il n’a pas été décidé dans le contexte des hausses des droits de douane, mais pour desservir le marché américain.
Plus récemment, le français Schneider Electric, spécialiste des équipements électriques, a déclaré prévoir d’investir « plus de 700 millions de dollars aux États-Unis », son principal vivier de croissance. Une somme fléchée vers l’intelligence artificielle (IA) et l’énergie d’ici à 2027.
Dans un autre registre, l’armateur français CMA CGM (propriétaire de La Tribune) a présenté début mars des investissements de 20 milliards de dollars (17,6 milliards d’euros) aux États-Unis, destinés à « construire des infrastructures et des terminaux logistiques pour le transport maritime », comme l’avait alors précisé Donald Trump.
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Agathe Perrier