Mathieu Thomasset / Hans Lucas
La guerre est déclarée
Par Marianne
Publié le
Afin de relancer le débat sur l’interdiction des réseaux sociaux aux moins de 15 ans, la ministre déléguée chargée du Numérique, Clara Chappaz, a annoncé que la France allait se donner « trois mois » pour « mobiliser ses partenaires européens » sur un « accord » contraignant les plateformes à vérifier l’âge de leurs utilisateurs.
Au sein de l’exécutif français, le son de cloche est le même depuis plusieurs mois et pourtant, le processus semble stagner. À la suite de travaux d’experts sur l’impact de l’exposition des jeunes aux écrans et près d’un an après qu’Emmanuel Macron s’est prononcé en faveur de l’interdiction des réseaux sociaux avant 15 ans, la ministre déléguée chargée du Numérique, Clara Chappaz, réitère cette requête.
Plus précisément, dans les colonnes de la Tribune dimanche ce 11 mai, elle affirme que la France se donne « trois mois » pour « mobiliser ses partenaires européens » sur un « accord » contraignant les réseaux sociaux à vérifier l’âge de leurs utilisateurs. Faute de quoi, « la France prendra ses responsabilités », menace-t-elle, sous-entendant que des sanctions seront à prévoir pour ces plateformes.
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« À l’échelle européenne, nous avons (…) un cadre d’action de référence : le règlement sur les services numériques [Digital Services Act, N.D.L.R.] », rappelle la ministre. « Mais il faut aller plus loin pour renforcer sa portée, afin qu’il contraigne les réseaux sociaux à ne pas accepter la création de comptes sans vérification d’âge. »
Un projet qu’elle avait déjà avancé au micro de France Info en avril dernier, tandis que l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal, a rédigé une tribune en ce sens, publiée dans le Figaro et coécrite avec le pédopsychiatre, Marcel Rufo. Rappelant que « les adolescents passent entre 3 h 30 et 5 heures par jour devant un écran, et bientôt plus de temps devant leurs écrans qu’à l’école », les deux auteurs réclament que « l’état d’urgence doit être déclaré contre les écrans ».
Une « coalition » au niveau européen
Ce dimanche, Clara Chappaz fait part de sa volonté de « rallier une coalition avec l’Espagne, la Grèce et maintenant l’Irlande, pour convaincre la Commission européenne ». Car c’est justement cette dernière qui a bloqué l’entrée en vigueur de la loi française sur la majorité numérique à 15 ans, adoptée à l’été 2023. Faute de conformité au droit européen, la Commission a estimé que la France ne pouvait pas imposer de vérification de l’âge.
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Au sein de l’UE, les initiatives en ce sens sont pourtant pléthores. Le gouvernement espagnol a présenté en juin 2024 une loi interdisant l’accès des moins de 16 ans aux réseaux sociaux. Et, en Grèce, une campagne a été lancée en janvier dernier visant à protéger les adolescents contre la « dépendance à l’égard des sites web ». En France, selon un sondage de juillet 2024, réalisé par Harris Interactive, 73 % des citoyens sont favorables à une interdiction des réseaux sociaux aux moins de 15 ans, tant les ravages des algorithmes sur les jeunes font consensus.
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À la Tribune dimanche, la ministre Clara Chappaz se dit plutôt optimiste, rappelant les progrès réalisés dans la protection des adolescents vis-à-vis des contenus pornographiques. « Depuis le début du mois de mars, l’Arcom [le gendarme de l’audiovisuel, N.D.L.R.] a commencé à bloquer les sites qui ne respectent pas la législation française. Ils doivent vérifier que les internautes ont plus de 18 ans ». Si les plateformes « ne mettent pas en place de solutions de vérification d’âge solides, elles sont sanctionnées. Demain, je veux qu’il en soit de même pour les utilisateurs des réseaux sociaux de moins de 15 ans », martèle la ministre.
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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne