Les jeunes, devenus sourds tant médicalement que métaphoriquement, refusent ce monde qui depuis quelques mois ressemble à un asile dont les fous auraient pris le contrôle. Pour notre chroniqueur et écrivain Jérôme Leroy, être sourd, ou faire semblant d’être sourd, consisterait à faire sécession, à résister de manière passive.
Je suis rassuré. Je viens de comprendre un grand mystère à propos de la jeunesse. Longtemps, la jeunesse, pour moi, c’était quand même ce qu’il y avait de meilleur dans une société. D’ailleurs, les vieux ont assez vite inventé le terme de « jeunisme » pour discréditer la jeunesse mais aussi moquer ceux qui voulaient voir en elle le sel de la terre, ou à défaut, le terreau de saines révoltes.
Un jeune, ça ne se laissait pas faire, ça ne trouvait que rien n’allait de soi, même pas le bonheur. Tenez, Mai 68, si vilipendé aujourd’hui comme source de tous nos malheurs, a quand même été la révolte d’une jeunesse qui avait tout ou presque dans cette société des Trente Glorieuses. Eh bien, ils n’étaient pas contents quand même, les jeunes, ils trouvaient qu’on ne pouvait pas tomber amoureux d’un taux de croissance. Ils avaient raison même si aujourd’hui tout le monde est amoureux de la croissance mais c’est toujours la même histoire, on s’aperçoit qu’on aimait la femme de sa vie une fois qu’elle a claqué la porte.