Le rendement de l’obligation à dix ans de l’État allemand a atteint 2,79 % ce mercredi, soit une hausse de 0,29 point de pourcentage par rapport à la veille. Ainsi, le taux d’intérêt de référence de l’Allemagne atteint un sommet jamais vu depuis mars 1990. Il a même entraîné une flambée des taux sur l’ensemble du continent. Le taux d’emprunt de la France à échéance 10 ans est passé de 3,23 % mardi à 3,49 % mercredi, son équivalent en Italie est passé de 3,62 % à 3,90 %.
À l’origine de ce fort mouvement sur les obligations : un plan d’investissement sans précédent annoncé par le futur chancelier Merz pour renforcer son armée et son économie. « La hausse de ces taux reflète principalement une hausse des perspectives de croissance et d’inflation » après les « annonces historiques de l’Allemagne », explique François Rimeu, stratégiste sénior chez Crédit Mutuel Asset Management.
Remise en cause du« frein à l’endettement »
La première économie européenne, en récession depuis deux ans, va lancer un fonds spécial de 500 milliards d’euros sur 10 ans pour rénover les infrastructures et gagner en compétitivité.
Surtout, toutes les dépenses de défense dépassant le seuil de 1 % du Produit intérieur brut (PIB) allemand, soit au-dessus de 45 milliards d’euros environ, ne seront plus décomptées dans le dispositif du pays du « frein à l’endettement ». Les dépenses militaires pourraient ainsi atteindre au moins 100 milliards d’euros par an, selon l’une des négociatrices du SPD, soit deux fois plus qu’actuellement.
En parallèle, il faut aussi considérer « le plan de réarmement de l’UE », a expliqué François Rimeu. La Commission européenne a dévoilé mardi un plan pour mobiliser près de 800 milliards d’euros pour la défense européenne, mais aussi pour fournir une aide « immédiate » à l’Ukraine après le gel de l’aide américaine. Ursula von der Leyen, présidente de l’institution, a confirmé sa volonté d’encourager les États à dépenser plus pour leur défense, sans être contraints par les règles budgétaires qui les obligent à limiter leur déficit public à 3 % de leur Produit intérieur brut (PIB).
Concrètement, les 27 pourront consacrer 1,5 % supplémentaire de leur PIB à des dépenses militaires, chaque année pendant quatre ans, sans risque que cette augmentation soit prise en compte dans le calcul des déficits excessifs, a expliqué un responsable de la Commission sous couvert d’anonymat. Cette possibilité offerte aux États membres peut permettre de dégager quelque 650 milliards d’euros sur quatre ans, a assuré la Commission européenne. « La Banque européenne d’investissement pourrait financer tous les projets de la défense, ce qu’elle n’avait pas le droit de faire jusque-là », a aussi relevé François Rimeu. Défense, industrie et banque sur le podium
Les actions de la défense s’envolent
Face à tant d’annonces, les obligations ne sont pas les seuls actifs à avoir vu leurs taux s’envoler. Sur les marchés d’actions, l’indice vedette de la Bourse de Francfort, le DAX, s’est propulsé de 3,37 %, signant sa meilleure progression sur une séance depuis novembre 2022. Parmi les autres places du Vieux Continent, Milan a bondi de 2,08 %, Paris a aussi terminé en nette hausse de 1,56 %, seule Londres est restée à l’équilibre (-0,04 %).
Parmi les valeurs de la défense, à Paris, Thales s’est envolé de 7,63 % et Dassault Aviation de 4,29 %, à Francfort, Rheinmetall de 7,17 % et Hensoldt 8,89 %. A Stockholm, Saab a gagné 6,12 % et à Milan, Leonardo 3,93 %.
Du côté des industriels, ArcelorMittal a pris 10,47 % et le géant des matériaux Saint-Gobain 8,84 %. À Londres, Glencore a gagné 2,57 %. A Francfort, l’industriel Thyssenkrupp a bondi de 13,44 %. Les banques, soutenues par la hausse des rendements des obligations souveraines, ont aussi gagné du terrain. À Francfort, Deutsche Bank s’est envolé de 12,36 %, Commerzbank de 10,95 %. À Paris, Société Générale a progressé de 5,08 % et BNP Paribas de 4,14 %.
(Avec AFP)
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