L’élection triomphale de Bruno Retailleau n’a pas seulement propulsé le ministre de l’Intérieur sur le devant de la scène. Désormais, le natif de Cholet est entré assurément dans le camp des présidentiables du bloc central. Le nouveau patron des Républicains a fait d’une pierre deux coups : valider sa présence au gouvernement et, en même temps, enclencher une stratégie de reconquête des électeurs de droite partis chez Emmanuel Macron.
Édouard Philippe, Gabriel Attal et Gérald Darmanin voient donc surgir un rival de taille porté par des sondages de plus en plus favorables. Les trois mousquetaires du macronisme ont tout à craindre de ce d’Artagnan de la droite, venu non pas de Gascogne mais du pays des Chouans.
Éternel numéro deux, successivement soutien de Philippe de Villiers et de François Fillon, le Vendéen goûte depuis son entrée au gouvernement à l’onctueuse saveur de la popularité qu’il entretient en surfant habilement sur le besoin de sécurité de nos compatriotes, sur la demande d’une politique migratoire intransigeante.
Sa fermeté dans le différend qui oppose la France à l’Algérie explique aussi cette ascension qui lui permet d’éclipser son prédécesseur Gérald Darmanin, d’éteindre la hype autour de Gabriel Attal et de se rapprocher d’Édouard Philippe, le champion des sondages.
« La fin du macronisme »
Ce parcours sans faute jusque-là du sénateur de Vendée est d’autant plus étonnant qu’il repose sur des mots faute de… résultats concrets. Allergique aux modes, Bruno Retailleau incarne cette révolution conservatrice qui secoue un peu partout les démocraties occidentales. Sophie Primas, la porte-parole du gouvernement, a dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas en évoquant « la fin du macronisme ».
Une façon de proclamer le retour du clivage droite-gauche et pour les supporters du Vendéen, dont elle fait partie, celui d’une droite sur le modèle de celle que portait François Fillon en 2017. Dans cette configuration, Édouard Philippe se verrait attribuer le rôle de fils spirituel d’Alain Juppé… ce qui ne serait pas sans risque !
Sentant le danger et avant même l’élection à LR, l’ex-Premier ministre a durci le ton sur la sécurité, promettant une justice plus rapide. Il a compris qu’à l’ouest, il y a du nouveau et que la concurrence sera vive dans la période préliminaire à la présidentielle. Le « philippisme » reste à inventer pour être autre chose qu’un juppéisme ou un macronisme amélioré.
Vers une primaire d’exception ?
Gabriel Attal gonfle aussi les muscles sur le ring médiatique en proposant une interdiction du voile pour les mineures de moins de 15 ans dans l’espace public. Mesure difficilement applicable et juridiquement contestable… à laquelle Marine Le Pen n’avait pas songé ! Gérald Darmanin n’est pas en reste quand il annonce l’ouverture d’une prison réservée aux narcotrafiquants en forêt amazonienne. Plus vite, plus haut, plus fort. Telle pourrait être la devise en matière de répression de tous ces prétendants à la fonction suprême.
Comment, dès lors, les départager avant 2027 ? Plusieurs voix suggèrent l’organisation d’une primaire du bloc central mais aucun n’en a réellement envie à l’exception de Gérald Darmanin, le seul à ne pas diriger un parti. Le film de John Landis Un fauteuil pour deux (ou plutôt pour quatre) pourrait parfaitement illustrer ces rivalités à moins qu’un autre film du réalisateur américain ne résume la situation : L’embrouille est dans le sac.
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