La mort du pape François a bouleversé des millions de gens sur les cinq continents et rappelé que le souverain pontife constitue une personnalité unique au monde. Il suffit de citer quelques chiffres pour mesurer l’émotion suscitée par la disparition du Saint-Père : 400 .000 personnes se sont rassemblées Place Saint-Pierre à Rome, des représentants de 130 pays dont 50 chefs d’État ont assisté à ses funérailles. Quelle autre institution peut-elle rivaliser avec la papauté et ses deux mille ans d’histoire, son 1,4 milliard de fidèles et son clergé comptant 1 million de membres ?
Comme le faisait remarquer Napoléon, « les peuples passent, les trônes s’écroulent, l’Église demeure ». En témoigne le succès international du film Conclave sorti en décembre 2024, qui a réuni 1 million de spectateurs rien qu’en France. Des centaines de milliers de fidèles ont accompagné dans une inédite procession le cercueil du pape dans les rues de Rome. Un ultime bain de foule sous les applaudissements jusque dans cette simple basilique des faubourgs de la capitale italienne où « Franciscus » a fait le choix fort d’être inhumé plutôt que de rejoindre ses prédécesseurs dans les sous-sols du Vatican. Jusqu’au bout ce prince de l’Église aura cherché à l’ouvrir en rompant avec la pompe.
Dans un monde en plein chambardement, le successeur du pape François devra faire fructifier son héritage, celui d’une Église soucieuse de renouer avec le message des Évangiles en défendant les opprimés, les pauvres et les déracinés. Jean XXIII, durant les cinq années de son pontificat, affirmait dès les années 1960 que l’Église ne devait pas seulement s’occuper des catholiques, mais du monde.
Pape populaire, n’en déplaise à ses détracteurs, François a incarné et compris le basculement de l’Église vers le sud où vivent 80 % des fidèles en 2025. Pour mémoire, en 1900, 60 % des catholiques se trouvaient en Europe contre 20 % aujourd’hui. La nomination d’évêques dans des contrées improbables rappelle la vocation apostolique du Saint-Siège. Cette ouverture n’a pas été que géographique, comme le prouve la main tendue aux divorcés, aux remariés et aux homosexuels longtemps rejetés par une institution enfermée dans les traditions et les conservatismes.
Une profession de soi à défaut de foi !
D’ailleurs, les détracteurs du pontife argentin - à l’image de Philippe de Villiers en France et de JD Vance aux États-Unis - l’ont présenté comme un pape « woke » sans tenir compte de son intransigeance sur l’IVG ou l’euthanasie. Ces chrétiens qui militent pour un catholicisme radical ont manifestement oublié que la tempérance fait partie des vertus cardinales ! Pour reprendre les mots de Gisèle Halimi, « une foi n’est tolérable que si elle est tolérante ».
Malgré ses réserves sur l’action du pape François, Donald Trump, ce drôle de paroissien pourfendeur des migrants, si peu respectueux des femmes, a accouru à Rome pour les funérailles d’un pape qu’il exècre… Une profession de soi à défaut de foi ! Si les voix du Seigneur sont impénétrables, dit-on, celles de la vanité et de l’ostentation sont, en revanche, faciles à discerner.
Il appartiendra aux cardinaux lors du prochain conclave de placer sur le trône de saint Pierre un homme capable de préserver l’unité de l’Église et de trouver un subtil équilibre entre fidélité aux dogmes et assouplissement des rites. C’est ce que François Mauriac, intellectuel et croyant, préconisait dans les années 1960 en condamnant « les extrémistes de l’intégrisme et les extrémistes du progressisme ».
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Bruno Jeudy
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