Lionel Charbonnier, ancien gardien de l’équipe de France et d’Auxerre désormais consultant pour RMC Sport, fulmine contre les critiques sur Gianluigi Donnarumma, pointé du doigt pour sa fébrilité sur le but de Harvey Elliott, mercredi du PSG-Liverpool (0-1). S’il n’épargne pas l’Italien, il souligne des responsabilités partagées et une lecture tronquée de son match.
Depuis mercredi soir, Lionel Charbonnier est en “croisade” sur les réseaux sociaux. L’ancien gardien de l’AJ Auxerre et des Glasgow Rangers s’emporte contre les nombreuses critiques qui s’abattent sur Gianluigi Donnarumma et sa fébrilité sur la frappe victorieuse de Harvey Elliott. La seule cadrée de Liverpool, vainqueur du PSG (0-1) au Parc des Princes après avoir été outrageusement dominé lors de ce huitième de finale aller de la Ligue des champions.
“Que les gens arrêtent de palabrer quand on ne connaît pas le métier”
Au rayon des reproches figurent son placement approximatif, son temps de détente pour se coucher au sol et plus généralement ses difficultés à sortir des arrêts cruciaux lors des matchs importants. Surtout, l’Italien pâlit de la comparaison avec Alisson Becker, monstrueux dans le but de Liverpool avec un record d’arrêts à la clé (9). Ce qui fait bondir Lionel Charbonnier, champion du monde 1998.
“Tout le monde veut tomber sur lui parce que c’est bien de trouver un bouc émissaire”, déplore-t-il. “On ne peut comparer en aucun cas le match d’Alisson avec celui de Donnarumma, que ce soit techniquement ou mentalement. Il y a deux situations complètement opposées avec une beaucoup plus facile à gérer que l’autre. Je sais ce que c’est puisque l’AJA et les Rangers jouaient tout le temps en contre-attaque.”
L’action du but: la défense dans le viseur… et le manque d’autorité de Donnarumma
Ce but qui fait tant parler est le fruit d’une succession d’erreurs de la défense et d’un certain attentisme de l’international italien (70 sélections) dans la direction de ses joueurs, insiste l’ancien gardien.
“S’il avait pris le but (d’Elliott) au premier poteau, cela aurait été entièrement sa faute”, explique-t-il. “Il a couvert comme il faut son premier poteau, l’angle est parfaitement bouché. Il y a deux erreurs, celle de Nuno Mendes qui est à l’ouest et il y a un déséquilibre. Et la qualité première d’Alisson, c’est quoi? La relance, c’est le plus grand relanceur du monde au poste. Le but vient de sa relance. Il a vu le déséquilibre défensif et il l’a jouée dans l’axe pour regrouper les deux défenseurs axiaux du PSG, Mendes est spectateur et Elliott voit l’espace. Joeo Neves revient pour couvrir Marquinhos et Pacho qui font un deux pour deux.”
“C’est là qu’intervient la faute de Donnarumma: les grands gardiens de but arrêtent les buts avec la voix”, image-t-il.
“C’est là que ‘Gigio’ doit organiser sa défense en disant à Pacho d’aller sur la gauche. Autant aller compenser le déséquilibre qu’avait créé Nuno Mendes et le dire à un des deux (Pacho ou Joao Neves). Il faut arrêter les buts avec la voix, bien placer ses pions. Les pisse-vinaigres tapent sur Donnarumma mais pas au bon endroit.”
Lionel Charbonnier constate un autre petit bémol sur l’intervention du gardien de 26 ans. “Il me semble qu’il est toujours en train de se déplacer (au moment de la frappe), il n’est pas sur ses appuis”, avance-t-il. “Il manque de timing par rapport à la frappe, ce n’est pas un gardien explosif mais il ne peut pas tout avoir. On ne peut pas mesurer 3m et être en plus explosif. Mais si tu n’es pas explosif, tu dois te bloquer sur tes appuis. Je pense qu’il est toujours en déséquilibre, sur un appui arrière, il aurait dû mieux se bloquer pour être plus explosif.”
Une comparaison injuste avec Alisson: “le match de Donnarumma est beaucoup plus compliqué”
Lionel Charbonnier s’attaque enfin aux comparaisons entre la prestation exceptionnelle d’Alisson Becker et les critiques sur Gianluigi Donnarumma. Selon lui, tout aurait été différent, déjà, si Joao Neves avait converti l’offrande d’Ousmane Dembélé en début de match (16e). “Sans avoir fait un arrêt, si Neves marque ce but, Alisson ne fait pas du tout le même match et peut-être que le PSG en aurait marqué deux ou trois ensuite”, imagine-t-il. “Le match qu’a dû livrer hier (mercredi) Donnarumma est beaucoup plus compliqué que celui d’Alisson Becker. Mentalement, Alisson ne peut pas sortir de son match. Il a eu des arrêts plus ou moins difficiles, certains à portée de bras, ça l’a mis en confiance. Il a été tout le temps mis sous pression, et il a fait plus que la supporter, il l’a inversée, il est entré dans la tête des joueurs en multipliant les arrêts. Avoir une emprise sur le match quand tu es tout le temps sollicité, c’est comme quand tu écris un livre: c’est toi qui écris le livre mais si tu me demandes d’écrire la fin, ça va être compliqué parce que je n’ai pas du tout la même sensibilité.”
“Là, on n’est pas sur Foot Manager, on est aussi dans la gestion des émotions”, enfonce-t-il. “Et un match où un gardien n’est pas sollicité, c’est beaucoup plus difficile à gérer pour lui.” Lionel Charbonnier note peut-être un petit manque chez l’Italien sur cette capacité à rester dans son match “Gigio doit peut-être progresser dans la gestion de ces moments-là, mais ça, tu l’as ou non”, conclut-il. “Ce n’est pas le PSG qui a perdu contre Liverpool, c’est Alisson qui a battu le PSG, c’est tout. Que les gens arrêtent de palabrer quand on ne connaît pas le métier. Je ne suis pas un défenseur de Donnarumma, ce n’est pas le plus grand du monde, ce n’est pas mon gardien préféré mais il faut être un peu objectif.”