Sa visite était attendue en février… il aura finalement fallu patienter jusqu’à ce vendredi 11 avril pour que le ministre des Transports, Philippe Tabarot, vienne à Clermont-Ferrand évoquer la ligne Clermont-Paris. Mais il n’est pas venu les mains vides. Lors d’un comité de suivi, ce matin, le ministre a présenté une série de mesures pour cette ligne ferroviaire régulièrement impactée par de grands retards ou des annulations.
Mesures listées lors d’une réunion de deux heures à laquelle participait tout l’état-major de la SNCF à commencer par Jean-Pierre Farandou, le PDG du groupe SNCF, mais aussi Matthieu Chabanel, le PDG de SNCF Réseau, et Christophe Fanichet, le PDG de SNCF Voyageurs. Philippe Tabarot a voulu apporter des réponses de court terme pour répondre à l’urgence en attendant 2027 et l’arrivée des nouvelles rames Oxygène commandées par l’État.
Les premières annonces sont d’ordre correctives. Le ministre a demandé l’activation d’un plan de fiabilité, avec le renforcement de la maintenance préventive des locomotives de la ligne, en fin de vie et sujettes aux pannes fréquentes. SNCF Voyageurs indique qu’elle anticipera par exemple, le changement de plusieurs éléments de la chaîne électrique de traction ou des disjoncteurs…
Face à cette vétusté du parc, un cabinet indépendant va assister la SNCF afin de trouver des locomotives supplémentaires qui viendraient en appui de celles existantes. Le travail mené par la compagnie en interne depuis plusieurs mois n’ayant pas abouti. Des contacts ont déjà été pris avec six à sept loueurs au niveau européen, indique le Ministère des Transports, qui attend des résultats pour juillet. Mais cela soulève des questions techniques, notamment sur les comptabilités de fonctionnement et de vitesse, sans compter les conditions tarifaires.
« La qualité de service n’est pas au rendez-vous »
Le ministre annonce aussi l’affectation de deux ingénieurs supplémentaires de terrain qui pourront aider concrètement les dépanneurs.
« Cela viendra renforcer le pool d’ingénierie actuel, déjà très mobilisé. Les pannes sont de plus en plus complexes à résoudre car le matériel est ancien », explique SNCF Voyageurs.
Mais le ministre a surtout voulu marquer le coup, avec des mesures commerciales, et notamment une offre promotionnelle avec 10.000 billets dès juin à 19 euros. Philippe Tabarot promet également un dédommagement à hauteur de 10% pour les abonnés de la ligne ainsi qu’un remboursement automatique de 200% (contre 100% aujourd’hui) en cas de retard de plus de trois heures, activable dès maintenant.
« La qualité de service n’est pas au rendez-vous avec un taux de régularité observé l’an dernier de 81,5% pour les retards supérieurs à 5 minutes (en clair, près d’un train sur cinq arrive avec plus de cinq minutes de retard, ndlr) », commente le cabinet du ministre des Transports, qui n’est pas en mesure de chiffrer le coût total des mesures.
Christine Pirès-Beaune, députée du Puy-de-Dôme, va plus loin et rappelle que 38% des trains en retard le sont avec plus de 30 minutes. « 82% des heures perdues sont de la responsabilité de la SNCF », ajoute la parlementaire. Et c’est sans compter toutes les annulations.
Conscient que les nouvelles rames Oxygène ne « sont pas l’alpha et l’omega pour cette ligne », le ministre va lancer une étude avec des premiers résultats en fin d’année prochaine.
Objectif : passer d’une « logique palliative à une logique constructive », a indiqué le ministre, qui s’est engagé à revenir régulièrement à Clermont-Ferrand.
Cette réflexion devra définir les travaux nécessaires après 2027 pour renforcer la robustesse de la ligne et évaluer la faisabilité et le coût pour réduire le temps de trajet, comme le demandent les usagers de la ligne.
Usagers échaudés
Ces annonces seront-elles les bonnes ? Les usagers l’espèrent, mais ils sont échaudés et n’attendent plus de miracle. Le précédent plan d’urgence, présenté il y a un peu plus d’un an par Christophe Béchu, à l’époque ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et déjà Jean-Pierre Farandou, président de la SNCF, n’a pas bouleversé la donne. Le début de l’année a été particulièrement chaotique, avec en point d’orgue un train arrivé avec plus de 10 heures de retard en janvier. Le ministère des Transports le reconnaissait dans un communiqué en amont de cette réunion :
« Malgré ces investissements et les mesures engagées (…) la qualité de service demeure insuffisante sur cette ligne longue de 419 kilomètres et empruntée chaque année par 1,9 million de voyageurs ».
Ce plan à quarante millions d’euros était, pourtant, censé limiter les « grands retards », avec notamment une locomotive de secours implantée à mi-parcours à Nevers, la mise en place d’une équipe d’astreinte pour intervenir en cas d’incident, l’installation de 20 km de clôture le long des voies pour limiter l’instruction de gibiers… Le ministère rappelle aussi que des investissements significatifs ont été réalisés, depuis 2018, pour « rattraper le retard pris » : 760 millions d’euros engagés par SNCF Réseau pour la régénération de la plateforme ferroviaire, ainsi que 130 millions d’euros pour des opérations de modernisation, financées par l’État et la région Auvergne-Rhône-Alpes.