La fin d’un interminable feuilleton à rebondissements ? Rien n’est moins sûr. Seven & i et Couche-Tard (ACT) ont déclaré conjointement étudier des cessions de magasins afin d’apaiser les craintes des régulateurs américains en matière d’antitrust.
« Les conseillers financiers d’ACT et de Seven & i ont commencé à approcher conjointement des acquéreurs potentiels », a indiqué le groupe japonais, sans préciser quels établissements étaient concernés.
Avec 85 000 magasins dans une vingtaine de pays, 7-Eleven est la plus grande chaîne de supérettes au monde et le leader incontesté aux États-Unis. Fondée aux États-Unis, elle est passée sous pavillon japonais en 1990, lorsque le milliardaire Masatoshi Ito l’a intégrée à son empire international.
Jusqu’ici, Seven & i s’opposait à l’offre de rachat d’ACT, qui valoriserait l’entreprise à 47 milliards de dollars. Une première proposition avait été rejetée en septembre. Jeudi encore, le groupe japonais annonçait la cession de son activité de supermarchés et un vaste programme de rachat d’actions d’ici 2030, autant de mesures visant à renforcer sa valorisation et sa rentabilité pour décourager Couche-Tard.
Dans ce contexte, Seven & i a décidé de remplacer son PDG Ryuichi Isaka par Stephen Dacus, un Américain de 64 ans, administrateur indépendant et vétéran du secteur de la distribution au Japon. « J’ai moi-même travaillé dans un 7-Eleven dans ma jeunesse : mon père était franchisé, je devais y travailler de nuit… Une expérience formidable qui m’a permis d’apprécier combien nos franchisés travaillent dur et sont essentiels à notre réussite », a déclaré début mars le nouveau patron devant la presse. « Nous devons revenir aux fondamentaux, réduire la complexité de notre activité, diminuer les coûts et investir dans ce qui compte pour nos clients », a-t-il martelé.
Couche-Tard est déjà solidement implanté aux États-Unis
Une fusion entre Seven & i et ACT se heurterait à des défis réglementaires considérables. Couche-Tard est déjà solidement implanté aux États-Unis avec des milliers de magasins sous sa marque Circle K. L’ensemble représenterait un mastodonte du commerce de proximité difficile à faire valider par les autorités.
« Une question fondamentale est de savoir comment organiser la cession de 2 000 magasins ou plus, qui se chevauchent et devront être vendus à un acheteur viable, crédible et indépendant », a souligné Seven & i lundi.
Jusqu’à présent, ACT souhaitait conclure un accord avant d’identifier les magasins à céder. Un scénario jugé trop risqué par Seven & i, qui refusait « d’entrer aveuglément dans un accord de fusion sans perspective claire sur sa finalisation ». Le groupe japonais se montre désormais plus ouvert et explore avec ACT un « plan de désinvestissement crédible et réalisable » qui permettrait une évaluation plus réaliste de la proposition de Couche-Tard.
7-Eleven bientôt recentré sur le Japon ?
Couche-Tard reste optimiste. Dans une déclaration transmise samedi à l’AFP, le groupe canadien s’est dit persuadé « qu’il existe une voie claire pour obtenir les approbations réglementaires » aux États-Unis. Il affirme avoir déjà identifié un portefeuille de magasins susceptibles d’être cédés. Mais la perspective d’un mariage demeure incertaine. « Seven & i a toujours l’intention de lutter contre ce qui est de facto une OPA hostile de la part d’ACT », analyse Roy Larke, du cabinet JapanConsuming. Selon lui, Seven & i pourrait préférer se délester d’une partie de 7-Eleven pour se recentrer sur le Japon. « Un accord pourrait être conclu pour fusionner leurs activités aux États-Unis, mais les difficultés antitrust restent un obstacle majeur », estime-t-il.
Jeudi dernier, Seven & i a justement annoncé son projet d’introduire en Bourse à Wall Street sa branche 7-Eleven américaine d’ici fin 2026. Objectif : lui offrir une plus grande autonomie décisionnelle et une flexibilité financière accrue pour mieux s’adapter aux exigences du marché local. Le dossier est suivi de près par le gouvernement japonais, qui considère Seven & i comme une entreprise « essentielle ». Un quart des 7-Eleven se trouvent au Japon, où ces supérettes omniprésentes offrent une gamme étendue de services, des plats à emporter aux billetteries de concert.
(Avec AFP)
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