À chaque fait divers hors normes ou presque, la prose conspirationniste agite l’hypothèse du complot sataniste. Reste que la réalité du mouvement existe, tout comme ses passages à l’acte sanglants.
On lui donnerait le bon Dieu sans confession. Et pour cause : Jean-Christophe Thibault est curé du diocèse de Metz. Ce Ch’ti d’origine, fils de cheminot, n’a pourtant embrassé la foi chrétienne qu’à 22 ans. Si la conversion fut un brin tardive, c’est d’abord parce que ses parents revendiquaient un athéisme forcené teinté de marxisme, et ensuite parce que, enfant, il s’est retrouvé attiré par une forme de transcendance, mais pas celle qui est proposée par l’Église catholique, plutôt le luciférisme. « À 8 ans, avec un copain, j’ai commencé à pratiquer le pendule. Puis, vers 12 ans, l’hypnose. Sans le savoir, nous faisions des séances de spiritisme. Nous avons attiré à nous des forces très obscures », avance très sérieusement notre homme d’Église, devenu spécialiste des courants ésotériques. « Lucifer, c’est la figure de la connaissance. À travers l’occultisme et l’ésotérisme, je recherchais une forme de savoir. Avec tous les risques que cela comporte », confie-t-il.
Si le propos désarçonne, ce n’est pas seulement parce qu’un prêtre ancien sataniste n’a rien de banal, c’est aussi parce que l’existence même de ce genre de pratiques semble tout droit sortie des délires des théoriciens du complot. L’omniprésence des réseaux satanistes est en effet un grand classique de leur prose. À chaque fait divers scabreux impliquant des enfants, une même frange s’enflamme sur les réseaux sociaux en fonçant tête baissée vers l’hypothèse d’un réseau pédosataniste. Dernier exemple en date : la disparition du petit Émile. Dans les premiers mois de l’enquête, le maire de la commune du Vernet, lieu du drame, avait été accusé d’être responsable de la mort du garçon de 2 ans et demi. « Sur les réseaux sociaux, des gens ont raconté que l’enfant était mort dans une messe noire à laquelle j’assistais, dans les catacombes de l’église. C’était affreux… », se lamentait-il auprès du Monde.