Une campagne de brouillage s’abat soudain sur les navires de guerre au large d’Arnland, un pays fictif. L’attaque risque de grandement perturber les opérations en mer… Pour la cinquième année consécutive, le CNES a hébergé à Toulouse pendant dix jours près de 200 civils et militaires issus de 13 pays dans le cadre de l’exercice spatial militaire AsterX. L’objectif : monter en compétence sur le spatial militaire, nouveau champ de conflictualité.
Comme lors des précédentes éditions, il est question d’une grande puissance (Mercure) qui tente de déstabiliser un pays voisin, notamment en s’approchant trop près de ses satellites. Un scénario fictif mais pour autant crédible à la lumière de la tentative d’espionnage russe ciblant un satellite français, Athena-Fidus, dévoilée en 2018.
Près de 200 civils et militaires issus de 13 pays ont participé à l’exercice AsterX. (Crédits : Rémi Benoit)
Se préparer à une guerre de haute intensité
Mais au-delà des tensions croissantes dans l’espace, les armées ont besoin de se préparer à coordonner leurs opérations dans l’espace avec les autres champs de conflictualité (air, terre, mer), raison pour laquelle pour la première fois des officiers de liaison de chaque domaine ont participé à la simulation. « Le spatial apporte un grand soutien aux opérations. Les communications sont assurées par satellite. Les constellations GNSS (GPS, Galileo) permettent de positionner sur le plan d’eau et garantissent le temps universel », rappelle le lieutenant de vaisseau Maxime, officier de liaison maritime lors de l’exercice AsterX.
Une attaque cyber a également été déployée, paralysant une partie des postes informatiques et obligeant les équipes à fonctionner en mode dégradé. Pour détecter les manœuvres inamicales, les militaires s’appuient sur des solutions développées par des industriels et des start-up. « Nous mettons à disposition un outil pour visualiser la situation spatiale, autrement dit l’ensemble des objets en orbite afin de limiter le risque de collision. Travailler sur de vraies données nous permet d’améliorer l’outil », explique Nicolas Molinier, responsable produits de Look Up Space.
Pour s’entraîner dans des conditions proches du réel, les participants de l’exercice sont épaulés par un conseiller politique et une conseillère juridique afin d’évaluer l’impact de leurs opérations. « Il faut se conformer au droit national et au droit international, détaille la commissaire Justine. A savoir qu’en temps de paix, il existe des règlements onusiens visant à adopter des comportements responsables dans l’espace. En revanche, en temps de guerre, le droit des conflits armées s’applique. Nous profitons de l’exercice pour tester la coopération avec un pays allié qui ne veut pas devenir belligérant »
L’exercice permet aux militaires de se préparer à une guerre multi-champs. (Crédits : Rémi Benoit)
Météo de l’espace
Autant de compétences que le Commandement de l’espace met déjà en œuvre au quotidien pour juguler les menaces en orbite. « Les opérations réelles ont déjà commencé, explique le général Adam, commandant de l’espace. Nous faisons déjà au quotidien de la météo spatiale, pour dire aux forces armées tel jour à telle heure vous serez survoler par un satellite. Nous réalisons aussi de la prévision de retombées d’objets spatiaux. Ces opérations réelles sont amenées à se développer dans les prochaines années. »
Six ans après sa fondation et la création de 400 postes, le Commandement de l’espace (CDE) va prendre une autre dimension à compter de cet été avec la création à Toulouse de la base aérienne 101 (numéro autrefois attribué à la base de Francazal). « C’est une étape plutôt formelle qui ancre la structure locale dans le réseau des bases aériennes. Elle compte également un certain nombre d’attributs symboliques et notamment la garde d’un drapeau qui pourra défiler en tête des troupes du CDE le 14 juillet à Paris », a expliqué le général Adam.
Le général Adam, commandant de l’espace. (Crédits : Rémi Benoit)
Une étape intermédiaire avant la livraison en fin d’année des bâtiments définitifs du Commandement de l’Espace et du Centre d’excellence de l’OTAN érigés sur un terrain de trois hectares sur la partie sud du CNES. Un chantier à 80 millions d’euros qui permettra d’accueillir plus de 500 personnes et d’accompagner la montée en puissance de la France sur ces enjeux stratégiques.