Depuis cette scène hallucinante d’un Volodymyr Zelensky humilié devant le monde entier, la dure réalité nous saute aux yeux : nous, les Européens, sommes seuls. Seuls face à notre destin et à nos responsabilités.
Depuis 80 ans, les Européens se sont, par paresse et par négligence, placés délibérément dans une relation de dépendance vis-à-vis des Américains. Cette dépendance est devenue emprise, comme nous l’avons vu en 2003 lorsque la France a été bien seule à assumer une voix différente.
Elle l’a pu et elle le peut encore, grâce au général de Gaulle qui prouve une fois de plus quel immense homme d’État il était. Sa vision était claire, elle tient en deux principes : primauté absolue de l’État-nation et refus de toute domination supranationale, qu’elle vienne de Moscou, de Washington, ou demain, de Pékin.
Son programme, c’était la France, son destin et son rang, bien loin des lâchetés apeurées ou calculatrices de certaines personnalités publiques qui ne cessent de s’en réclamer, mais le trahissent à chaque phrase. On imagine mal le général de Gaulle quémander un peu d’attention du président américain, et manquer à ce point de clairvoyance sur un homme comme Trump. Ce manque de lucidité, sur Donald Trump comme sur Vladimir Poutine, est impardonnable : quand on se dit patriote, on ne cède ni à la trumpisation, ni à la poutinisation des esprits.
Seule une France forte et sûre d’elle-même pourra convaincre un certain nombre de pays de l’Union européenne de la suivre.
La situation est grave, mais il y a incontestablement un moment français qui se présente. Il s’agit désormais de ne pas laisser cette chance passer, et de suivre soixante ans plus tard le même chemin que le général de Gaulle. Le réveil militaire d’abord et avant tout. C’est la première étape, incontournable, sans laquelle rien n’est possible.
Le réveil industriel et technologique ensuite. C’est en effet l’autre grande leçon de De Gaulle : notre puissance militaire n’est qu’un reflet de notre puissance industrielle et technologique. Le plan calcul, le Concorde et le France sont inséparables de nos succès atomiques.
Chacun a un rôle à jouer. À Nice, nous sommes déterminés à prendre notre part, en développant notamment la filière des drones sous-marins, un domaine d’une importance stratégique majeure et dans lequel la France pourrait devenir un leader mondial. Si la recherche et l’industrie niçoise, en plein développement depuis quelques années, peuvent être utiles à ce pays, il est de notre devoir de le faire, et vite.
Le reste – programme d’armement commun aux différents pays en Europe, véritable interopérabilité, harmonisation des équipements, État-major de planification commun – viendra ensuite. Seule une France forte et sûre d’elle-même pourra convaincre un certain nombre de pays de l’Union européenne, sans doute pas tous, de la suivre. Le sursaut européen doit commencer par la France : c’est la grande leçon du gaullisme.
Christian Estrosi est maire de Nice, président de la métropole Nice-Côte-d’Azur, président-délégué de la région Sud-Provence-Côte d’Azur et ancien ministre de l’Industrie.
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Par Christian Estrosi, maire de Nice