Si les femmes ont conquis leurs droits politiques, sociaux, sexuels et reproductifs, l’égalité économique et financière demeure en 2025 inachevée tant le statut de l’argent des femmes est soumis à questionnement. Une problématique qui irrigue leur vie quotidienne et recouvre de nombreux aspects : droits professionnels, bancaires, fiscaux et successoraux. En France, l’impôt est prélevé à la source sur les revenus de chaque membre du couple.
À partir du 1er septembre prochain, une révolution fiscale à la fois silencieuse et existentielle pour les droits économiques des femmes s’engagera : le principe actuel qui prévaut, en proposant par défaut un taux unique de prélèvement à la source, sera renversé par l’application d’un taux individualisé pour les couples mariés ou pacsés. Derrière ce jargon technique, c’est une promesse d’autonomie, d’égalité et de justice économique qui se dessine pour des millions de femmes.
Dans 78 % des cas, la femme gagne moins
Le taux conjugalisé est issu d’un modèle fiscal conçu sur un modèle familial daté, et constitue en 2025 une charge fiscale qui pénalise les revenus du conjoint le moins aisé, qui est dans 78 % des cas, une femme.
Les impacts seront considérables, notamment au sein des couples où il existe une forte disparité de revenus. En effet, le taux unique de prélèvement à la source ne tient pas compte des écarts de revenus entre conjoints : le salaire le plus modeste est imposé au même taux que le plus élevé, contraignant, dans l’écrasante majorité, une femme à supporter par conséquent une charge fiscale disproportionnée qui n’est pas sienne, grevant ainsi ses choix économiques et renforçant une dépendance financière souvent invisible.
Le taux conjugalisé est issu d’un modèle fiscal conçu sur un modèle familial daté, et constitue en 2025 une charge fiscale qui pénalise les revenus du conjoint le moins aisé, qui est dans 78 % des cas, une femme.
Or, il est temps de le rappeler avec force : l’argent des femmes ne peut plus être considéré comme un revenu d’appoint ou une variable d’ajustement. C’est un pilier de notre économie nationale.
Une fiscalité équitable entre les femmes et les hommes est à l’évidence un impératif social mais constitue également un levier majeur de croissance économique.
Le taux unique de prélèvement à la source freine durablement l’accès des femmes au marché du travail : en France, 30 % des femmes en couple avec enfants ne travaillent pas à temps plein – souvent par arbitrage économique, et non par choix. Or, selon l’OCDE, une hausse de 10 % du taux d’emploi des femmes pourrait entraîner un gain de croissance de 1 à 2 % du PIB.
Équilibrer les relations économiques et sociales
L’impôt, au-delà de son caractère technique, constitue l’un des fondements de notre pacte social et engage des choix de société qui peuvent contribuer, dans le cadre d’un corpus global de politiques volontaristes à équilibrer les relations économiques et sociales entre les femmes et les hommes.
Nombreux sont encore les dispositifs fiscaux, bancaires ou financiers, qui, empreints d’une conception passée de la famille et des individus, bloquent la pleine autonomie économique et financière des femmes. En cause, des biais sexistes manifestes ou implicites qui, selon que le contribuable, l’entrepreneur, l’investisseur est un homme ou une femme, impactent directement ses conditions de vie, d’emploi, la répartition de son épargne ou de son patrimoine, comme ses choix d’investissement.
Comme le rappelait Simone de Beauvoir, « l’indépendance économique est la condition indispensable de la liberté des femmes ». Cette clé, encore souvent confisquée dans le huis clos fiscal du couple, est aujourd’hui remise entre les mains de chacune.
Comme le rappelait Simone de Beauvoir, « l’indépendance économique est la condition indispensable de la liberté des femmes ».
En individualisant le taux de prélèvement à la source, nous posons une première pierre à l’individualisation fiscale globale, afin de permettre aux femmes, dans notre pays, de bénéficier enfin d’un statut de sujet fiscal plein et entier.
Ne nous y trompons pas : ce qui est en jeu, ce n’est pas simplement une meilleure gestion de l’impôt.
C’est un impératif d’égalité réelle.
C’est la capacité pour chaque femme de dire : « Mon argent, mon choix. »
À lire également
Marie-Pierre Rixain, députée EPR de l’Essonne