C’est une date importante pour le foot français car la FFF annonce ce lundi un projet de gouvernance inédit du football professionnel en totale rupture avec ce qui se faisait jusque-là. Alors que les clubs français sont en grande souffrance dans l’ombre du succès européen du PSG, la FFF souhaite reprendre la main en optant pour un modèle où la LFP comme entité juridique n’existe plus. Les clubs seraient en première ligne, sans intermédiaire, au sein d’une société qui dirigera le foot pro. Explications.
C’est une petite révolution qui se prépare pour l’organisation du football professionnel. Après son annonce du 3 mars, en demandant aux clubs de réfléchir à des pistes de réformes autour de trois thèmes (gouvernance, stratégie économique et contrôle financier), Philippe Diallo a décidé de passer à l’action. Même s’il restera des aménagements à affiner, le cadre est clairement posé par le président de la FFF : le football pro en France ne sera plus organisé par la Ligue de football professionnel. Les clubs de Ligue 1 et Ligue 2 deviendront actionnaires d’une société dont les autres actionnaires seront CVC (qui conservera ses 13%) et la FFF qui aura une action préférentielle avec droit de véto notamment sur les sujets les plus structurants (formats des compétitions, nombre de montées et descentes).
L’idée est que cette société de clubs ne soit plus uniquement une société qui gère les questions commerciales et économiques, comme actuellement. La FFF souhaite que l’objet social de la société permette que la société reste organisatrice des championnats. La FFF devrait tout de même récupérer des compétences régaliennes comme la DNCG, voire la commission de discipline. Les détails de ces questions ne sont pas encore définis mais la FFF souhaite mutualiser au maximum les services afin de faire baisser les coûts de fonctionnement.
La gouvernance de cette société serait ainsi comparable à celle de n’importe quelle société. Il n’y aurait plus d’élections pour élire un président. Un conseil d’administration se réunirait pour nommer les dirigeants qui seront des mandataires sociaux rémunérés qui pourraient se faire débarquer si les objectifs ne sont pas atteints. Les familles du foot (entraineurs, joueurs, arbitres, personnels administratifs) pourraient être réunis au sein d’un conseil de surveillance. Ce modèle ressemble de très près à ce qui se fait en Angleterre avec la Premier League. “Un modèle Premier League mais en prenant bien en compte avec les spécificités françaises”, précise une source fédérale.
La nouvelle organisation pourrait être mise en œuvre pour le début de la saison 2026-2027
Afin d’aboutir à ce nouveau modèle de gouvernance, il faut changer la loi. Cela tombe bien, le duo de sénateur Laurent Lafon-Michel Savin ont récemment écrit une proposition de loi (PPL) relative à l’organisation, à la gestion et au financement du sport professionnel. Elle sera examinée par les sénateurs le 10 juin avec l’espoir d’une adoption définitive par le Parlement à l’automne. Aucun changement ne pourra donc intervenir pour la saison prochaine. Mais la nouvelle organisation pourrait être mise en œuvre pour le début de la saison 2026-2027.
Au-delà de cette grande réforme de la gouvernance, la FFF souhaite imposer de nouvelles règles afin d’assainir les finances des clubs, dont certains sont toujours au bord de dépôt de bilan. Parmi ces règles, il y a la limitation du nombre de contrats possibles au sein d’un effectif et le plafonnement de la masse salariale avec de nouveaux ratios encore plus contraignants qu’aujourd’hui. Le plafond de 70% du chiffre d’affaires consacré à la masse salariale globale pourrait être encore abaissé. La FFF souhaite s’inspirer de ce qu’a mis en place l’UEFA dans le cadre de son fair-play financier. Elle souhaite aussi une nouvelle répartition des droits TV entre les clubs. Sans remettre totalement en cause l’élitisme prôné par Vincent Labrune avec des locomotives qui capteraient davantage de revenus que les clubs non européens, Philippe Diallo souhaiterait tout de même rééquilibrer cette répartition en faveur des plus petits budgets afin de conserver un minimum de compétitivité et donc d’intérêt du championnat. Enfin, la FFF souhaite rester très attentive à l’évolution de la multipropriété sans avoir pour le moment de mesures concrètes sur ce sujet qui ne pourrait être traité efficacement qu’avec le concours des institutions internationales (Fifa, UEFA).
“Ce n’est que le début du processus mais le cadre est clairement posé”, poursuit cette source fédérale qui précise que les choses se feront par étape. D’abord faire en sorte qu’aucun club ne dépose le bilan cet été avec des règles de la DNCG encore plus strictes pour assainir les comptes. Trouver un accord ensuite sur les droits TV avec une chaine de la Ligue soutenue par un acteur du marché (Canal+ ?) pour reconquérir les fans de foot. Et ensuite transformer les statuts et modifier la gouvernance au cours de la saison prochaine, avec comme espoir que le foot français améliore son image, son attractivité et fasse grandir sa valeur.