On avait laissé Venturi sur les circuits de la Formula-E, ce championnat dédié aux monoplaces électriques, antichambre de la mobilité du futur et mise à l’échelle réelle des solutions décarbonées. Mais en 2022, après 8 saisons, changement de braquet et virage pris vers le spatial, nouveau terrain de jeu et d’expérimentation pour l’entreprise basée à Monaco.
Trois ans plus tard, voici Venturi Space, filiale de la PME monégasque, au Salon du Bourget avec Mona Luna, son rover lunaire pensé pour accompagner les besoins et les projets des agences spatiales nationales et européennes. Un engin imaginé par le designer historique de Venturi, Sacha Lakic et assemblé à Toulouse. Équipée d’un bras robotisé pour manipuler charges utiles et outils scientifiques et de panneaux solaires, Mona Luna et ses 750 kg ont surtout un objectif, être opérationnels pour la mission prévue au pôle Sud de la Lune en 2030, mission opérée par Ariane 6.4.
Cependant Mona Luna n’est pas le premier rover imaginé par Venturi qui a déjà deux autres engins à son actif. Flex, également dessiné par Sacha Lakic, embarquera avec Space X pour une mission vers la Lune en 2027 mais il est également destiné à assumer des missions privées. Flip – pour Flex Lunar Innovation Plateform – sera également transporté par Space X dans le cadre de la mission Griffin-1 en 2026, annonce le groupe.
Le test des conditions extrêmes
Sur ces projets, Venturi Space bénéficie surtout de toute l’expérience et l’expertise du groupe dirigé par Gildo Pastor en termes de mobilité électrique et d’engins soumis aux conditions extrêmes. Car bien avant l’aventure en Formula-E, Venturi a mené des opérations de démonstration et de tests des capacités des véhicules électriques. Notamment avec « Jamais Contente », un programme qui a développé en 2009 un véhicule dessiné pour les records de vitesse testant une version hydrogène alimentée par une pile à combustible puis un pack batterie électrique, chaque session ayant tutoyé les 500 km/h.
En parallèle, un rover terrestre a également été développé en 2009, avec l’objectif de répondre aux besoins des stations polaires, alors dépourvues de solutions de mobilité non polluantes. Ainsi nait Antarctica, à la demande du Prince Albert II de Monaco, opérationnelle depuis 2021 et qui équipe désormais la station scientifique belge Princesse Elisabeth en Antarctique.
Des roues hyper-déformables développées en Suisse
Sur les projets développés, notamment par Venturi Astrolab, Venturi Space apporte sa contribution via des batteries haute performance, résistantes à -240° comme à +130°, qui sont conçues à Monaco. Mais la filiale a surtout travaillé sur des roues hyper-déformables, le pneumatique terrestre n’étant pas adapté au sol lunaire. C’est donc en Suisse que les ingénieurs ont mis au point cette roue constituée de câbles disposés en quatre rangées avec des angles différents pour permettre une transmission optimale des accélérations et des freinages. Le comportement du rover Flip sera d’ailleurs regardé attentivement puisque c’est lui qui testera ces roues innovantes, confrontées à la nuit lunaire, longue de 14 jours.
Mais la Lune n’est pas le seul objectif de Venturi qui réfléchit à un rover destiné à Mars, qui s’appuie sur la technologie du rover Flex.
L’entreprise monégasque a par ailleurs nommé l’astronaute français Jean-François Clervoy, aujourd’hui président d’honneur de Novespace, la filiale du CNES, comme ambassadeur en février dernier. Car l’objectif de Gildo Pastor est de servir la souveraineté européenne, « à la hauteur des enjeux économiques et scientifiques », dit-il. Le calendrier désormais se structure autour de la mise en service de Flip d’ici la fin de l’année, en attendant que la NASA retienne définitivement Flex, présélectionné pour la mission lunaire américaine. Venturi, qui ne communique ni sur les investissements consentis, ni sur son chiffre d’affaires, emploie 80 personnes dans ses différentes filiales en France, en Suisse et à Monaco.