Passe d’armes entre écrans interposés dimanche entre les États-Unis et la Pologne. Tout est parti d’un message posté par Elon Musk sur le réseau social X, dont il est d’ailleurs propriétaire. « Mon système Starlink est la colonne vertébrale de l’armée ukrainienne. Toute leur ligne de front s’effondrerait si je l’éteignais », a-t-il écrit, semant ainsi le doute sur le maintien de l’accès à ce réseau de satellites à l’Ukraine.
Il aura fallu attendre quelques heures avant qu’il ne rassure son audience. « Pour être extrêmement clair, malgré tous mes désaccords avec la politique de l’Ukraine, Starlink ne fermera jamais ses terminaux. Je veux simplement dire que sans Starlink, les réseaux ukrainiens s’effondreraient puisque les Russes peuvent brouiller tous les autres canaux de communication ! Mais jamais nous le ferions ou l’utiliserions comme un moyen de négociation », a-t-il ajouté.
« Be quiet, small man »
Sauf qu’entre-temps, les claviers ont chauffé. Le premier message du désormais proche collaborateur du président Trump a suscité la réaction du ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski. « C’est le ministère polonais de la Numérisation qui paie les satellites Starlink pour l’Ukraine, pour 50 millions de dollars par an », a-t-il répondu. Et Elon Musk de rétorquer sèchement : « Tais-toi, petit homme. Tu payes une petite partie du coût total. Et il n’y a pas de substitut à Starlink ».
Le secrétaire d’État américain Marco Rubio – qui selon la presse américaine a récemment eu des désaccords avec Elon Musk – s’est aussi mêlé à l’échange, accusant son homologue polonais d’ « inventer des choses ». « Personne n’a menacé de couper l’accès à Starlink à l’Ukraine. Et dites “merci” parce que sans Starlink l’Ukraine aurait perdu cette guerre depuis bien longtemps et les Russes seraient actuellement à la frontière polonaise », a-t-il intimé. Une dernière phrase qui rappelle celle qu’il a tenue au président ukrainien Volodymyr Zelensky, lors de son entrevue musclée avec Donald Trump dans le Bureau ovale fin février.
Un message qui a plutôt eu son effet puisque Radoslaw Sikorski lui a rapidement répondu. « Merci Marco pour cette confirmation que les courageux soldats ukrainiens peuvent compter sur le service numérique vital conjointement apporté par les États-Unis et la Pologne ».
Faire pression sur l’Ukraine ?
Les interrogations sur l’accès ukrainien au réseau Starlink sont toutefois antérieures et ont commencé quand Donald Trump a suspendu l’aide militaire américaine à l’Ukraine la semaine dernière. Et, selon des informations de presse, les menaces autour de ce réseau pourraient faire partie de la stratégie de Washington pour faire pression sur Kiev afin qu’il conclue un accord sur les minéraux essentiels de l’Ukraine.
Des pourparlers autour d’un tel accord doivent d’ailleurs avoir lieu ce mardi en Arabie saoudite entre responsables américains et ukrainiens. Plus globalement, ces discussions très attendues doivent servir à « définir un cadre pour un accord de paix et un cessez-le-feu initial » entre la Russie et l’Ukraine, a indiqué l’émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, qui sera présent. L’Ukraine est restée quant à elle plus vague. « Nous espérons discuter et se mettre d’accord sur les décisions et étapes nécessaires », a fait savoir Volodymyr Zelensky, sans préciser sur quel sujet.
À la recherche d’une alternative
L’Union européenne étudie en tout cas comment fournir à l’Ukraine une alternative à Starlink, comme l’a rapporté le Financial Times la semaine dernière. Quatre des plus grandes sociétés européennes de satellites seraient ainsi en pourparlers avec les dirigeants européens sur la manière de renforcer la connectivité Internet en Ukraine : Eutelsat en France, SES au Luxembourg, Hisdesat en Espagne et Viasat, propriétaire de la société britannique Inmarsat.
Une information confirmée côté français. « Nous collaborons activement avec les institutions européennes et des partenaires commerciaux afin de permettre le déploiement rapide de terminaux d’utilisateurs supplémentaires pour des missions critiques et les infrastructures », a reconnu Eutelsat auprès de l’AFP. Et d’assurer : « En Europe, Eutelsat offre les mêmes capacités que Starlink en matière de couverture et de latence ».
Ce qu’a toutefois nuancé le directeur de recherche du cabinet de conseil Analysys Mason, Lluc Palerm Serra, au quotidien américain : aucune de ces alternatives possibles « ne peut offrir le niveau d’approvisionnement dont dispose Starlink », selon lui. Actuellement, 42 000 terminaux Starlink sont utilisés dans toute l’Ukraine.
(Avec AFP)
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