Environnement, innovation, commerce, santé… L’Assemblée nationale a acté cette semaine la suppression d’une vingtaine d’instances consultatives dans le cadre des débats sur un projet de loi « simplification ». Ces comités, observatoires, hauts conseils et autres commissions nationales ont été supprimés avec les voix du Rassemblement national, des Républicains et, parfois, du bloc central. La gauche et une partie du bloc central sont parvenus à en sauvegarder plusieurs, comme les Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (Ceser), composés d’entreprises, syndicats, associations et personnalités qualifiées.
Mais cette alliance de circonstance a échoué à en réintroduire certains, comme l’Agence de financement des infrastructures de transports (Afit), l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV), le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique, l’Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers ou encore le Comité national d’expertise de l’innovation pédagogique.
LA TRIBUNE — De manière générale, à quoi servent les instances consultatives ?
JEAN GROSSET — Elles permettent, à l’image des Ceser ou du Cese, que des acteurs de la société civile discutent entre eux, émettent des rapports, et par ces rapports irriguent le débat politique. L’intérêt, par exemple des Ceser de Bretagne ou d’Aquitaine, est d’avoir une étude fine sur les transports, d’y associer le patronat, les organisations syndicales, les associations de l’environnement et de sortir un rapport sur les transports de la région.
Ce n’est pas du tout antinomique avec le fait d’élire des députés. Au contraire, cela permet, lorsque cela fonctionne correctement, de ne pas attendre tous les quatre ou cinq ans pour discuter avec les citoyens.
Certaines mériteraient-elles d’être supprimées ?
Soit il faut démontrer que ces structures n’ont aucun intérêt ou que ce sont des niches à jetons de présence de partenaires sociaux. Mais quand je vois un peu ce qu’il en est, ce n’est pas du tout le cas. Soit il faut démontrer qu’elles ne sortent aucun avis ou qu’il y a redondance. Concernant les Ceser, il n’y avait redondance avec rien. C’est une absurdité totale d’avoir voulu les supprimer.
Sur d’autres instances, il faut regarder cas par cas. Si des structures n’émettent pas d’avis ou de rapports, personne ne va se plaindre qu’elles soient supprimées. Mais si elles font avancer le débat, il faut conserver ces structures.
Quels moyens sont alloués à ces instances consultatives ?
Je ne suis pas sûr que cela représente des sommes colossales. Par exemple, le budget annuel du Cese est de 41 millions d’euros tout confondu. C’est une somme très importante, mais cela représente des fonctionnaires et des personnes qui travaillent par ailleurs. J’entends qu’il y a besoin, en période de crise financière dans un pays endetté, de trouver de l’argent, mais supprimer des structures de concertation, de compromis, et qui permettent à ce que des gens s’entendent dans un pays qui est assez fracturé… À mon avis, ce ne sont pas des dépenses inutiles.
Qui pâtira de leur suppression ?
Si des instances de concertation ou de discussion et des associations de la société civile sont supprimées, je ne vois pas par quoi elles seront remplacées. La conséquence, c’est que les régions qui utilisent ces avis n’en disposent plus. Si elles veulent continuer de travailler sérieusement, elles devront par exemple contacter de façon bilatérale les patrons du transport comme Transdev, Keolis, Trenitalia, les organisations syndicales, puis les associations environnementales les unes après les autres. Elles ne pourront pas éviter cela, à moins de ne plus discuter avec personne.
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Marius Bocquet