Le commandant Vidal a mené pendant dix ans toute l’enquête libyenne visant la campagne de Nicolas Sarkozy de 2007. Devant le tribunal, ce policier modeste et précis a livré un témoignage au scalpel. En filigrane : sa conviction absolue d’un financement occulte.
Personne n’a jamais vu son visage en public. Il n’a jamais accordé la moindre interview. Il n’a jamais été cité dans le moindre article. Il ne parle dans aucun documentaire. Et pourtant, il sait tout. L’affaire libyenne, en coulisses, c’est lui. Le commandant Frédéric Vidal a été pendant dix ans le directeur d’enquête du dossier au sein de l’office anticorruption. « C’est la commission rogatoire la plus longue et la plus intense de ma carrière », glisse-t-il. Mille trois cents procès-verbaux, 60 perquisitions, plus de 500 scellés, et 180 auditions. Et des milliers d’heures, pendant dix ans, à se fatiguer les yeux sur des lignes de comptes bancaires dans ce qu’il va appeler « la caverne d’Ali Baba ».
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C’est lui, le commandant Vidal, qui a dépiauté les écoutes Sarkozy, flairant que l’ancien président avait un téléphone caché. C’est lui qui a perquisitionné chez Alexandre Djouhri en Suisse, découvrant dans le coffre de l’intermédiaire le RIB de Claude Guéant. C’est lui qui est tombé sur les deux tableaux flamands de l’ancien secrétaire général de l’Élysée, vendus un demi-million d’euros à un obscur acheteur malais. C’est encore lui qui a pisté la trace des espèces dans la présidentielle de 2007. Billet après billet. Incohérence après incohérence. Ce lundi 18 mars, le commandant Vidal est à la barre du procès libyen, entendu sous serment comme témoin, cité par la défense de Béchir Saleh, l’ancien bras droit de Kadhafi. « Une faute professionnelle », grincent depuis plusieurs semaines plusieurs avocats en défense, qui redoutent que cette déposition soit un réquisitoire avant l’heure. Effectivement, ils ne vont pas être déçus…