Dans cette usine pilote, les moteurs, boîtes de vitesses, filtres à particules, capteurs Nox (oxydes d’azote), injecteurs, mufflers (échappements) et sous ensembles des camions du groupe Volvo retrouvent une seconde vie grâce au remanufacturing (remise à neuf). Pour l’industriel, une étape supplémentaire dans ce processus de rénovation a été franchie en mettant au point, voilà déjà quatre ans, une technologie unique au monde pour rénover les filtres à particules des échappements.
Jusqu’à présent, ils ne pouvaient être rénovés qu’une seule fois. En investissant 1,4 million d’euros dans son outil industriel, Volvo Renault Trucks est désormais capable de prolonger la durée de vie des filtres à particules. « Nous avions stocké 12 000 filtres en deux ans le temps de concevoir cette machine, explique Stéphane Covasson, directeur du site. Les filtres à particules arrivent à l’usine encrassés par des suies, il faut les éliminer en les brûlant, souffler les filtres et aspirer. Cette machine nous permet de tester la performance catalytique du filtre, de savoir si on peut ou pas le remettre sur le marché. Les résultats sont déjà meilleurs qu’espérés après le deuxième nettoyage, ce qui est prometteur. Nous ignorons la limite du nombre de nettoyages, trois fois, quatre, cinq… »
Cet équipement conçu en interne permet de mesurer avec précision le niveau de conversion chimique des gaz d’échappement, ce qui prolonge l’usage des filtres, des pièces très coûteuses à l’état neuf. Après rénovation, les performances sont identiques à la pièce d’origine. Sur un poids lourd, cette opération est nécessaire tous les trois à quatre ans, soit tous les 500 000 kilomètres. Lorsqu’un filtre ne répond plus aux critères d’exigence du constructeur, les matériaux qu’il renferme sont valorisés à 85 %.
« Réutiliser 85 % de matériaux d’un produit »
Actuellement, dix-huit opérateurs se relaient en 3×8 sur la chaîne, week-end compris, la seule à fonctionner en continu. Les carcasses à rénover sont confiées par les concessionnaires. « Un produit rénové coûte 30 % moins cher que le neuf », ajoute Stéphane Covasson. Ainsi, la part des capteurs Nox réutilisés a quasi doublé atteignant 23 % en 2024, celle des boîtes de vitesses est passée de 49 % en 2023 à 38 % en 2024 mais celle des moteurs a stagné à 13 %.
Chaque carcasse suit un processus industriel bien huilé : première inspection, prélavage et démontage complet, nettoyage, diagnostic, inspection des pièces jusqu’à la pièce unitaire, rénovation et récupération des pièces, remplacement systématique des pièces d’usure ne pouvant être rénovées à savoir pistons, jointerie, roulements, coussinets, arbres à cames afin de garantir la qualité du produit final. Viennent ensuite le remontage et les essais des organes. Le sablage des boîtes à vitesse va redonner un aspect visuel neuf.
« 50 ans de réserve de métaux rares »
Les pièces remanufacturées sont expédiées vers les sites Renault Trucks Vénissieux, Volvo Gand (Belgique) et aux États-Unis. « Le remanufacturing permet de réutiliser jusqu’à 85 % de matériaux d’un produit et d’économiser 80 % d’énergie », assure Stéphane Covasson.
L’autre objectif est de réduire au maximum l’utilisation de matériaux tels que l’acier, l’aluminium et la fonte de même que l’extraction des métaux rares que sont le palladium et le platine. « Les terres rares deviennent très rares d’autant plus avec les conflits géopolitiques, c’est le nerf de la guerre pour l’avenir, remarque le directeur du site. Il faut donc éviter d’en extraire pour maintenir cette économie car il n’y a que 50 ans de réserve vu la consommation actuelle. »
Un site automobile en croissance
Présent à Limoges depuis 1938 (initialement au Palais-sur-Vienne), cette usine pilote de 22 000 m², dont 20 000 m ² dédiés au processus industriel, est sortie de terre en 2003 dans la zone industrielle Nord de Limoges. Elle compte 260 salariés pour un chiffre d’affaires de 60 millions en 2024 en hausse de 20,2 % en un an. « C’est le meilleur chiffre d’affaires que nous avons réalisé notamment grâce aux capteurs Nox et pour 2025, cela devait être le même, estime le dirigeant. Les perspectives sont positives après la baisse des ventes de camions en 2020. »
Les voyants sont au vert et les filières de recyclage en place pour recevoir les déchets produits sur place. « Environ 3 600 tonnes sont recyclées par an sur 4 000. On s’impose comme frein aucun enfouissement, dès qu’un nouveau produit entre dans l’usine, on réfléchit au traitement des déchets hors enfouissement. », précise Stéphane Covasson. Le prochain investissement d’un million d’euros concernera la ligne de boîtes de vitesse qui sera améliorée au 1er trimestre 2026 afin d’étendre la période de maintenance.