Un an après l’annonce de la dissolution, Emmanuel Macron ne peut que constater le caractère funeste de cette décision. 71% des Français et surtout 80% des électeurs de son propre camp condamnent cette initiative. Nos compatriotes partagés entre déception et amertume, ne nourrissent plus aucune illusion sur les deux dernières années d’un mandat que le président a lui-même saboté !
À la différence d’Ethan Hunt, le héros de Mission impossible, ce n’est pas la bande annonçant sa mission qu’il a vue s’auto-détruire, mais lui-même… Si le chef de l’État disposera à nouveau – le 8 juillet – de la capacité de dissoudre, pas sûr qu’il s’engage dans cette voie, car deux tiers des sondés ne le souhaitent pas et l’immobilisme dans lequel le pays vit semble préférable à une nouvelle période de turbulence et de discorde. « La popularité n’est pas ma boussole », proférait-il il y a quelques années.
Aujourd’hui, les Français sont en droit de se demander si le président a encore une boussole politique. Ce qui s’est passé en juin dernier a lancé une course de désorientation, laissant nos concitoyens hagards et sans repères.
En 2017, on croyait qu’avait été élu un président audacieux et inspiré. En 2024, on a découvert un joueur de poker fantasque qui peine à assumer un coup de bluff électoral aux conséquences dévastatrices. Le chef de l’État, dont le crédit et la parole sont dévalués, doit se contenter de préserver ce qu’il estime être les points forts de son action : la non-augmentation des impôts, la réforme des retraites, les acquis de la transition écologique et, surtout, l’attractivité économique de la France, qui reste l’un des succès de sa politique.
Malheureusement pour lui, il est devenu inaudible comme l’a montré son émission de trois heures sur TF1, dont on n’a pratiquement rien retenu. « Encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots. » Cette phrase de la chanson de Dalida et Alain Delon, Paroles Paroles, résume la difficulté du président à convaincre et à persuader.
Mis de facto hors jeu de la politique intérieure, il privilégie la scène internationale pour retrouver la lumière. Les errements de Donald Trump lui ont permis de faire entendre la voix de l’Europe avec un discours ferme et mesuré dans un contexte de tensions. Pourtant la vague populiste qu’illustre l’élection d’un président conservateur en Pologne ainsi que la montée en puissance du chancelier allemand, Friedrich Merz, pourraient vite contrarier cette embellie diplomatique.
La signature récente de contrats économiques significatifs lors de sa tournée asiatique a été éclipsée par les chamailleries du couple présidentiel… La conférence des Océans à partir du 9 juin à Nice, le prochain G7 au Canada et la réunion cruciale sur le conflit israélo-palestinien à l’ONU ne pourront faire oublier l’échec du projet politique d’Emmanuel Macron, ce « en même temps » qui était censé dépasser les notions de gauche et de droite. On assiste en effet au retour du régime des partis que l’instauration de la proportionnelle ne ferait que renforcer.
Enfin, la droitisation de Gabriel Attal et d’Édouard Philippe constitue un coup fatal au dogme macroniste. Réduit au rôle de spectateur de la vie politique et de commentateur de son bilan, il voit venir cette heure grave où l’on doit rendre des comptes. Il pourra méditer cette réflexion aussi lucide que cruelle de Boualem Sansal : « Une fois dedans, on ne sort plus du déclin, car on n’a plus les yeux pour le voir. »
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Bruno Jeudy, directeur délégué de la rédaction